L'orgue Dallam de Saint-Guinal
Historique
Il fut chargé de construire le grand orgue de la cathédrale, et la famille Dallam garda longtemps des attaches avec Quimper. En 1660, à la restauration de la monarchie anglaise, Robert Dallam rentra dans son pays, mais son fils Thomas resta dans le Finistère où il s'établit et travailla sans relâche jusqu'à sa mort à Guimiliau en 1705. On lui doit les orgues déjà citées ainsi que d'autres disparues depuis.
L'orgue de Ploujean, près de Morlaix, fut commandé en 1677 et terminé en 1680 ; il est donc contemporain de celui d'Ergué, avec lequel il présente de nombreuses analogies : les deux orgues ne possèdenr qu'un seul clavier à l'arrière du buffet, et tous deux se trouvent placés en bord de tribune, tels des positifs.
Restaurations
Quelques années plus tard cependant, il semble que l'orgue soit devenu muet, et ce triste état devait durer jusqu'en 1980. L'instrument tricentenaire, classé Monument Historique, fut alors restauré par Jean Renaud sous la direction de Jean-Albert Villard. L'objectif était de revenir autant que possible à l'état de 1680. Les travaux portèrent sur la remise en état de la tuyauterie, de la soufflerie, du sommier, de la mécanique des claviers et des registres, ainsi que sur le buffet et la tribune.
Partie sonore et buffet
Composition actuelle (conforme à la composition d'origine, 1680) :
- Clavier de 48 notes, Ut à Ut sans premier Ut#
- Bourdon 8
- Montre 4
- Flûte 4 à cheminée
- Nasard 2 2/3
- Doublette 3
- Tierce 1 3/5
- Fourniture III
- Cymbale II
- Cornet V (de Ut 3)
- Trompette 8 (en basses et dessus, coupure entre Ré# et Mi)
- Voie humaine 8 (idem)
Le tempérament est inégal, proche de celui préconisé par Schlick, mais légèrement moins affirmé. La composition du plein-jeu est conforme à celle de l'orgue français classique, par exemple à celle de Dom Bédos, avec les reprises sur les Fa et Ut.
Les tailles des tuyaux sont homogènes par famille de jeux : une taille pour les principaux, une pour les jeux flûtés. Le bourdon 8 possède des tuyaux de plusieurs jeux anciens, bourdons ou flûtes. La trompette 8, de Dallam, n'a probablement pas été d'abord destinée à Ergué-Gabéric. Les tuyaux, trop longs ne pouvaient trouver place dans le buffet, et elle parle mieux avec une pression légèrement plus basse que celle des autres jeux.
Les bouches sont assez basses. Beaucoup avaient été relevées au cours des siècles, mais il a été possible de retrouver la hauteur d'origine, en se basant sur quelques tuyaux témoins, pratiquement non retouchés depuis leur fabrication.
Le buffet a retrouvé sa polychromie et ses dorures anciennes, que le XIXe siècle avait camouflées sous une couche de peinture marron. La tourelle centrale a la forme d'une proue de navire, ce que l'on retrouve dans les autres buffets Dallam, les tourelles latérales, plus courtes, s'arrondissent au-dessus des encorbellements.
La décoration sculptée est des plus simples dans la partie basse, mais s'orne d'anges à la trompette dans les hauteurs. On trouve aussi des anges musiciens sur les fresques décorant la tribune avec l'inscription en latin "Laudate Dom in timpano et choro. Laudate Eum in chordis et organo". Ces panneaux peints, eux aussi restaurés en 1980, rehaussent le buffet de leurs chaudes couleurs.
On ira donc à Guimiliau écouter un grand orgue Dallam de trois claviers et pédalier, pouvant interprêter avec raffinement toute la musique ancienne ; on ira à Ploujean pour écouter un Dallam de taille moyenne, à un clavier et pédalier ; on ira à Ergué-Gabéric pour écouter un petit Dallam à un seul clavier, aux riches possibilités malgré sa taille - et son ramage étant égal à son plumage, on goûtera le chatoiement de ses ors et de ses couleurs.