Les municipalités d'Ergué-Gabéric sous la Révolution

Jean-François Douguet 

 

Arkae > Tresors archives > Politique > Les municipalités d'Ergué-Gabéric sous la Révolution > ArretéBernez Rouz : " Avec Jean-François Douguet, on y voit plus clair sur la mise en place de l’institution communale pendant la Révolution.
La rareté des archives, la briéveté des mandats électifs, la complexité des structures mises en place compliquent le travail de l’historien. Quelques noms au hasard de l’état civil nous renseignent sur la qualité de nos compatriotes engagés dans la lente construction de la démocratie locale.  

Heureusement d’autres communes ont gardé plus d’archives. On sait donc comment la Révolution a bouleversé les institutions locales, et on peut en tirer des conclusions pour Ergué, faire se rejoindre les bribes éparses de notre mémoire collective.

Loin de la fureur des sans-culottes, des luttes fratricides entre Girondins et Jacobins et des épisodes de la chouannerie, la Révolution s’est semble-t-il passée sans heurts sur les terres gabéricoises. Reste à glaner cette étrange moisson d’archives nouvelles dans un calendrier républicain déroutant.

Le travail de Jean-François Douguet y participe et complète le livre sur Alain Dumoulin, un recteur breton dans la tourmente révolutionnaire, disponible cet été. "

 

Photo : Municipalité an III : Arrêté des représentants du peuple Faure et Tréhouart donnant la liste des membres du conseil municipal d’Ergué-Gabéric, en date du 26 pluviôse an III (14 février 1795).

 

Les nouvelles institutions

Le 16 novembre 1789 l’Assemblée constituante, après avoir créé les départements et les districts, décide de les subdiviser en cantons et communes. La loi du 14 décembre suivant précise les modalités d’administration et d’élections des nouvelles organisations municipales.

Chaque commune doit être dirigée par un corps municipal, composé d’officiers municipaux, d’un nombre variable selon sa taille, d’un procureur et d’un maire. Ce corps municipal appartient à un conseil général composé d’un nombre de notables double de celui du corps municipal. Chaque fonction donne lieu à une élection séparée. Le maire et le procureur sont élus pour deux ans, rééligibles qu’après un délai de deux ans sans mandat. Les officiers municipaux et les notables, élus aussi pour deux ans, sont renouvelables par moitié chaque année.

Les attributions des nouvelles municipalités sont considérables : gestion des biens communs, budget, travaux publics, voirie, répartition des impôts, mais aussi un pouvoir réglementaire, notamment dans le domaine économique (droit de taxe) et de police (droit de requérir la force publique). Le maire peut aussi proclamer la loi martiale en arborant un drapeau rouge sur la façade de la mairie, mais il ne peut quitter le territoire de la commune sans autorisation. Quant au procureur, il représente à la fois le gouvernement et la population. Il est tantôt avocat, tantôt accusateur public, et il a voix consultative dans toutes les affaires. C’est un préfet communal avant la lettre, ce qui lui donne un pouvoir considérable… et il peut circuler librement.

Pour être électeur il faut être citoyen actif, c’est-à-dire être de nationalité française, avoir plus de vingt cinq ans, être domicilié dans la commune depuis au moins un an, ne pas être en état de domesticité, ni en situation de faillite et payer un impôt au moins égal à trois jours de salaire d’un ouvrier. En 1790 cette contribution est fixée à quinze sols la journée. Pour être éligible il faut réunir les mêmes conditions, mais l’impôt est fixé à dix jours de travail. Et seuls les hommes ont droit de vote.

Jérôme Kgourlai, premier maire… de la paroisse

Arkae > Tresors archives > Politique > Les municipalités d'Ergué-Gabéric sous la Révolution > Acte baptemeCent trente-et-un Gabéricois, soit un peu plus de 8% de la population, sont appelés à voter début 1790 pour élire cinq officiers municipaux (pour les communes ayant entre 500 et 3000 habitants) et dix notables, plus le maire et le procureur.
Les procès-verbaux de ces premières élections ont malheureusement disparu. C’est l’état civil qui permet d’identifier les premiers élus. Ainsi le baptême de René Le Pétillon, de La Salleverte, le 16 juin 1790, révèle que son père, aussi prénommé René, est le procureur de la commune. Deux mois plus tard, le 12 août, c’est l’acte de baptême de Françoise Credou, de Khaut, qui indique que le parrain, Jérôme Kgourlay1 est le « maire de cette paroisse »2.
Un autre acte de baptême précise que René Le Pétillon est aussi administrateur du district de Quimper. A défaut de tornade révolutionnaire, c’est un vent nouveau qui souffle sur la nouvelle commune d’Ergué-Gabéric, car aucun de ces deux hommes n’était signataire des cahiers de doléances rédigés quelques mois plus tôt.

Photo : Cohabitation à Ergué-Gabéric où le recteur Dumoulin mentionne sur l’acte de baptême de Marie Le Dore,
le 15 août 1790, les nouvelles fonctions du parrain, Jérôme Kergourlay maire de cette paroisse (sic).


Le 9 juin suivant décède René Le Pétillon, « ancien électeur de la commune ». Sans doute a-t-il démissionné pour raisons de santé de ses fonctions de procureur. Son successeur à cette fonction, Augustin Géllard, de Congallic, assiste à son enterrement en compagnie du maire.

Cependant c’est la polémique sur le découpage des cantons qui permet d’identifier l’intégralité de la première municipalité d’Ergué-Gabéric.
Dès 1790 la nouvelle commune est rattachée au canton de Rosporden avec celles d’Elliant, Saint-Yvi, Locmaria-Hent3, et Tourc’h. Fureur des Elliantais, vexés qu’une de leurs anciennes trêves obtienne la prééminence dans les nouvelles institutions. Ils font intervenir leur recteur l’abbé Guino, alors député du Clergé à l’Assemblée constituante qui, le 30 mai 1791, sollicite l’appui des plus hautes autorités locales : François-Jérôme Le Déan, maire de Quimper, Louis Alexandre Expilly, le nouvel évêque, et Augustin Le Goazre de Kervélégant, député du Tiers-Etat qui appuie la pétition d’un commentaire personnel : « il ne me paraît point raisonnable d’obliger les habitants de la paroisse4 d’Ergué-Gabéric de traverser celle d’Elliant pour celle de Rosporden ».
« Nous préférons le canton de Quimper à celui d’Elliant, et celui d’Elliant à celui de Rosporden… »
Mais cela ne convient pas non plus aux Gabéricois qui le font savoir par une requête adressée aux administrateurs du directoire départemental. Si la municipalité appuie les pétitions d’Elliant pour que le chef-lieu de canton soit au bourg de cette commune, plus proche, elle ne manque pas de faire observer aussi qu’elle préférerait être rattachée au canton de Quimper :
« Ce jour 28 novembre 1790 le conseil général de la paroisse, assemblé dans la personne de Jérôme Kgourlai maire, de René Le Gouerou, de Hervé Lizien, d’Allain Rannou, de Jean Gourmelen officiers municipaux, de Jean Lozac’h, Guénolé Laurent, François Le Poupon, Louis Le Naour, Hervé Le Pétillon, Louis Le Bihan, tous notables5. Présent Augustin Gélard procureur de la commune… a arrêté de suplié messieurs les administrateurs du département de finistère et messieurs les administrateurs du district de fixer irrévocablement le chef lieu du canton au bourg d’elliant [qui] est plus au centre du canton que Rosporden…
... Le conseil général de la commune a aussi arrêté de supplier messieurs les administrateurs du département et du district de Quimper de réunir la paroisse d'Ergué-Gabéric au canton de Quimper dont elle est beaucoup plus près que d'Elliant ; les villages d'Ergué les plus voisins du bourg d'Elliant en sont distants de cinq quarts de lieue, et les plus éloignés à trois fortes lieues, ajoutez les mauvais chemins de cette paroisse à Elliant ; au lieu que plusieurs villages d'Ergué-Gabéric ne sont qu'à une demie lieue de Quimper, et nos villages les plus éloignés de Quimper n'en sont distants que de deux lieues au plus. Nous avons tout à gagner si nous étions réunis au canton de Quimper; nous préférons donc le canton de Quimper à celui d'Elliant, et celui d'Elliant à celui de Rosporden ».

Quelques mois plus tard la municipalité demande à « Mr l’abbé Guino recteur d’Elliant et député aux Etats généraux de représenter aux augustes membres des dits Etats que plusieurs quartiers de cette paroisse étant au moins éloignés de Rosporden de quatre lieues, outre les difficultés des chemins, nous désirerions tous dans cette commune de voir fixer irrévocablement le chef lieu du canton au susdit bourg d’Elliant. Tels sont les vœux ardents des citoyens actifs de la commune d’Ergué-Gabéric ».

Cette nouvelle requête est signée Jérôme Kgourlay maire, Alain Rannou et Hervé Lizien, officiers municipaux, Jérôme Credou, René Seznec, François Laurans, Pierre Jean Credou et François Le Poupon, notables, et René Le Pétillon, administrateur du district de Quimper.
Quatre nouveaux noms apparaissent, sans doute élus lors de l’élection partielle de décembre 1790.

La mairie siège à la sacristie…

Dans un premier temps Elliant croit avoir obtenu gain de cause car le directoire du district de Quimper se prononce en sa faveur le 14 juin 1791, mais dans sa séance du 18 juin le directoire départemental arrête que la commune d'Ergué-Gabéric est rattachée au canton de Quimper.
De ce fait Elliant n'est plus le point central du nouveau canton et « considérant qu'il se tient à Rosporden des foires et marchés, dont la privation ajouteroit à la perte de ses octrois et celle de la juridiction qui s'y exerçoit » il arrête aussi que le « chef-lieu demeurera irrévocablement en la ville de Rosporden. »

Entre temps, le 2 février 1791, une autre requête, pour demander le maintien des prêtres réfractaires dans la paroisse « pour n’être pas privés des secours spirituels », complète la liste des élus en 1791: Jérôme Kgourlay, maire, Augustin Gélard, procureur, Jean Gourmelen, Alain Rannou, Yves Le Meur, Hervé Lizien et René Gouerou, officiers municipaux, Jean Le Poupon, François Le Poupon, Jean Lozeac’h, Guennolé Laurent, Hervé Pétillon, Louis Le Naour, Alain Seznec, Charles Le Queneudec notables, Joseph François Mahé, secrétaire-greffier. La réunion s’est tenue «en la sacristie de la dite paroisse où a présidé Jérôme Kgourlay, maire …»

On trouve encore la signature de Jérôme Kgourlay et Alain Rannou le 15 mai 1791 dans la demande d’expulsion de la commune d’une fille de mauvaise vie, atteinte de la vérole qui « se lave dans neuf fontaines dans la persuasion de se guérir … Les habitants, qui ne peuvent avoir de l’eau potable que de ces fontaines, sont dans la plus grande gêne et souffrent d’être obligés de boire de ces fontaines… »

Troubles et incertitudes…

Arkae > Tresors archives > Politique > Les municipalités d'Ergué-Gabéric sous la Révolution > Jean Le JourNous n’avons nulle trace des élections de décembre 1791. Seul, le 30 mars 1792, l’acte de baptême de Barbe Le Jour, de Boden, mentionne que son père, Jean Le Jour, est le procureur de la commune. Ce qui indiquerait qu’il y a bien eu des élections avec, outre la moitié du conseil général de la commune (les notables), et du corps municipal (les officiers municipaux) à renouveler, un autre procureur et, normalement, un nouveau maire. Mais nous ne connaissons pas avec certitude son identité.

L’une des dernières mesures prises par l’Assemblée Législative est, par les décrets des 20 et 25 septembre 1792, la création de l’état civil. Confié au conseil général de la commune, celui-ci doit choisir en son sein la personne la plus compétente, à laquelle on donne le titre d’officier public, pour enregistrer les actes. Ainsi, le 26 janvier 1793, Jean Le Jour inscrit dans le premier registre de l’état civil que, « membre du conseil général de la commune d’Ergué-Gabéric, district de Quimper, département du Finistère », il a été « élu le neuf décembre dernier [1792] pour rédiger les actes destinés à constater les naissances, mariages et décès des citoyens… ».
A partir du 17 avril il mentionne son nouveau titre d’officier public, qu’il peut cumuler avec sa fonction de procureur. Le 19 août, venu déclarer la naissance de sa fille Marie Magdeleine, il charge « Jean Nicolas, membre du conseil général de la commune d’Ergué-Gabéric, qui fait fonction d’officier public », de rédiger l’acte de naissance.

Le 21 mars 1793, le procès-verbal de la levée d’un contingent de douze hommes d’Ergué-Gabéric, dans le cadre de la levée de 300 000 hommes décrétée par la Convention, est contresigné par Yves Le Meur, procureur de la commune, François Laurant, maire, et Jean Lejour, officier municipal6. François Laurent, de Squividan, est-il maire depuis décembre 1791, date à laquelle il aurait dû y avoir, constitutionnellement, un renouvellement ou, plus probablement, depuis le 9 décembre précédent. Dans plusieurs communes environnantes il y a également eu un changement de maire à cette époque7.

L’an I de la République

Arkae > Tresors archives > Politique > Les municipalités d'Ergué-Gabéric sous la Révolution > DeliberationPar l’acte constitutionnel du 24 juin 1793 la Convention apporte deux modifications importantes à la loi électorale. La majorité est ramenée de vingt-cinq à vingt-et-un an et le suffrage universel est instauré pour les hommes, sauf les domestiques, le pouvoir se méfiant de leur dépendance vis-à-vis de leurs « maîtres ». Le 4 décembre suivant une autre modification d’importance est adoptée en créant les agents nationaux à la place des procureurs, et en étendant leurs attributions, déjà importantes. Bien qu’élus par le peuple, ils représentent le gouvernement. Ils exercent leur contrôle sur les particuliers comme sur les autorités constituées (et donc le maire). Ils doivent prévenir le comité de sûreté générale de la tranquillité intérieure et des conspirations contre l’égalité et la liberté. Ils ont le droit de décerner des mandats d’arrêt, de mettre en liberté, de poser et lever des scellés. Ils doivent surveiller la stricte application des lois et sont tenus d’envoyer des rapports tous les dix jours à l’administration du district. De fait, ils ont plus de pouvoir que les maires.

Photo : Délibération de la municipalité d'Ergué-Gabéric.

Ces nouvelles mesures sont appliquées lors des élections du 9 février 1794 (elles auraient dû se dérouler en décembre 1793), dont nous ne retrouvons qu’une seule évocation, dans l’état civil, à l’occasion du changement d’officier public, Jean Le Jour, laissant la place à Rolland Coatmen, curé constitutionnel, «membre du conseil général de la commune, élu le 24 du présent mois de pluviôse (9 février 1794) pour rédiger les actes destinés à constater les décès… ». Cette élection devait aussi donner lieu à l’élection d’un nouveau maire (sauf si François Laurent a été élu en décembre 1792), tout comme le nouvel homme fort de la commune, l’agent national. Quant à Jean Le Jour on le retrouve comme officier municipal lors de l’estimation de la vente de la chapelle de Kerdévot comme bien national le 1er novembre 1794.

Enfin, après plus de trois ans d’incertitude, durant la période la plus trouble de la Révolution, un arrêté du 26 pluviôse an III (14 février 1795) des représentants du Peuple «prez les porte et côtes de Brest et de l’Orien », Tréhouart et Faure, nous renseignent à nouveau sur la composition du conseil municipal, probablement élu quelques jours plus tôt8: Jean Riou, de Tréodet, maire – René Le Guenno, de Sulvintin, Jean Le Gouzien, de Niverrot, René Gouerou, de Lec, Jean Jaouen (dont le nom est ajouté à la place de celui de Jean Le Jour qui est rayé), Allain Rannou, de Kourvois, officiers municipaux – Jean Credou, de Créac’h Ergué, agent national – Jean Le Signour, Denis Huitric, Joseph Le Roux, Pierre Lozach, Louis Le Naour, Louis Maugen, Guénolé Laurent, René Le Maguer, Jean Knevez, Louis Michelet, de Knogen, notables – Yves Kgourlai, secrétaire-greffier. Allain Rannou est aussi l’officier public.

D’anciens personnages de premier plan, comme Jérôme Kergourlai, Jean Le Jour, Augustin Géllart, sans doute contraints de se retirer par le renouvellement imposé par la constitution, et peut-être aussi « victimes » d’une épuration locale à la suite de la chute de Robespierre (27 juillet 1794), ne font plus partie du conseil général de la commune. Par contre les nouvelles lois électorales de 1793 ont permis l’élection comme officier municipal de Jean Gouzien, qui n’était pas citoyen actif en 1790. Joseph Le Roux et Louis Maugen quant à eux n’étaient pas recensés sur la commune.

Les municipalités cantonales

A leurs débuts ces réformes municipales sont accueillies avec satisfaction, mais les gouvernements se trouvent très vite confrontés à plusieurs problèmes. Dans les villes, la plupart des municipalités, imbues de leurs nouveaux pouvoirs, veulent affirmer leur indépendance vis-à-vis des autres administrations de districts et départementales. Dans les campagnes, le renouvellement exigé par la loi, la compétence et parfois la motivation des élus posent d’autres problèmes9.

Ainsi dès le 17 avril 1795 la Convention supprime les agents nationaux, puis, le 22 août suivant, les municipalités dans les communes de moins de 5 000 habitants. Dorénavant elles ont à leur tête un agent municipal et un adjoint élus par l’assemblée communale, de nouveau censitaire, pour deux ans. Les élections doivent avoir lieu à date fixe, le 1er germinal (22 ou 23 mars). L’ensemble des agents municipaux, et leurs adjoints, des communes d’un canton forme la municipalité cantonale dirigée par un président. Ergué-Gabéric, avec Kerfeunteun et Penhars, est rattaché au canton d’Ergué-Armel.

C’est au travers d’archives éparses que l’on retrouve les élus gabéricois. Ainsi le 23 février 1796 Jean Le Jour, agent municipal d’Ergué-Gabéric, et Jean Lozac’h, son adjoint, ainsi que l’ensemble du personnel cantonal sont invités à Ergué-Armel pour assister à « la fête commémorative de la mort du dernier des tyrans », et à prêter le serment « qu’ils sont sincèrement attachés à la république et qu’ils vouent une haine éternelle à la royauté ». Jérôme Kergourlay et Augustin Gélart, assesseurs du juge de paix du canton, absents, prêtent à leur tour serment le lendemain.

Lors des élections générales du 21 mars 1797 renouvelant cette assemblée, c’est Jean Nicolas, de Quilly huec, qui est élu agent municipal d’Ergué-Gabéric, et Alain Rannou, de Kourvois, adjoint 10.

Retour des maires… nommés

Il n’y a pas d’élections au printemps 1799, sans doute en raison de l’instabilité politique qui amène la chute du Directoire, et l’instauration du Consulat quelques mois plus tard après le coup d’état de Bonaparte le 18 brumaire (9 novembre).

La constitution de l’an VIII réorganise l’administration du pays. Les communes ont à nouveau un maire à leur tête, entouré d’un conseil municipal, mais dorénavant tous nommés par le préfet, nouveau personnage installé à la tête des départements. C’est ainsi que le registre des délibérations municipales d’Ergué-Gabéric commence, le 17 juin 1800, par la transcription de la nomination de Jean Le Jour aux fonctions de maire par le préfet du Finistère Charles Didelot. Il remplit aussi les fonctions d’officier public de l’état civil. Suit la nomination de son adjoint, François Mahé ? (le patronyme est malheureusement illisible), qui n’apparaît pas dans les délibérations suivantes11.

 

Sources et Bibliographie :

  • Histoire des institutions du droit public français au XIXe siècle 1789 - 1914 – Gabriel Lepointe – Ed. Domat Montchrestien, 1953.
  • Histoire des maires 1789 - 1939 – Jocelyne George – Terres de France, Plon - 1989
  • Archives départementales : séries L et M
  • Archives municipales : Etat-civil, Registre des délibérations municipales.

 

République, Liberté, Egalité?

Lorsque l’on consulte les premiers actes de l’état civil on ne manque pas d’être surpris par les expressions allégoriques des nouvelles années de Liberté, d’Egalité, de République... Il y a parfois de quoi s’y perdre. Ainsi la création d’un nouveau calendrier, révolutionnaire comme il se doit, adopté en novembre 1793, mais démarrant le 22 septembre 1792, date de l’instauration de la République, ne manqua pas de causer quelques tracas à l’officier public. Un petit aperçu nous en est proposé à la lecture de l’état civil, créé à la même époque, dont la rédaction donnait parfois lieu à des calendriers… pas très catholiques. Alors que le maire réunissait son conseil municipal à la sacristie, c’est le curé, constitutionnel, qui rédigeait l’état civil !
Contraint entre la rigueur demandée à la rédaction d’un acte officiel, et le zèle à montrer au nouveau régime, terrorisant, Rolland Coatmen ne sait plus, à défaut de saints, bannis, à quel an se vouer !
Ainsi le 20 septembre 1792 rédige-t-il l’an quatrième de la Liberté et première (sic) de Légalité (sic), puis, le 8 novembre l’an premier de la liberté française, et sur l’acte suivant l’an premier de la République française. Enfin, perdu dans ses calendriers, il choisit, le 25 novembre, de les regrouper, certain ainsi de ne pas se tromper : l’an premier de la Liberté et de la République française !
A moins que, enivré par l’enthousiasme d’une ère nouvelle, il se laisse emporter, comme bien d’autres, par les frissons de l’exaltation ! Ainsi la gazette Le Moniteur universel inscrivait-elle à sa une L’an 1er de la Liberté depuis le 14 juillet 1789 (prise de la Bastille), l’an IV de la Liberté et 1er de l’Egalité, depuis le 10 août 1792 (prise des Tuileries et arrestation de Louis XVI), l’an 1er de la République française, depuis le 21 septembre 1792 (instauration de la République). On peut remarquer que Rolland Coatmen reprend, le 20 septembre 1792, le même libellé que Le Moniteur universel met en exergue depuis le 10 août précédent. Lit-il cette gazette à Ergué-Gabéric, l’a-t-il vue ailleurs, ou respecte-t-il des directives? Quoiqu’il en soit nous sommes au début d’un nouveau calendrier, républicain, qui va durer quatorze ans.
 
A Ergué-Gabéric le 30 prairial An 219
 

Arkae > Tresors archives > Politique > Les municipalités d'Ergué-Gabéric sous la Révolution > tableau des municipalités

 

  1. Dans un souci historique nous transcrivons les noms dans leur graphie originale. Sous l’Ancien régime la lettre K est l’abréviation commune de Ker. Il faut donc lire Kerhaut, pour Khaut, Kergourlay, pour Kgourlay, etc.
  2. Le terme de commune n’est pas encore entré dans le langage courant…
  3. Sous l’Ancien régime la paroisse d’Elliant comprend les trêves de Rosporden, Saint-Yvi et Locmaria-Hent. Toutes ces entités deviennent communes en 1790. La commune de Locmaria-Hent est supprimée en 1792 et rattachée à celle de Saint-Yvi.
  4. Les communes existent déjà depuis un an et demi, mais même les élus ont du mal à intégrer ce nouveau vocabulaire.
  5. D’après la loi il manquerait un officier municipal et deux notables.
  6. Il faut noter que le procureur est mentionné avant le maire, ce qui confirme toute son importance dans les structures municipales de l’époque.
  7. Dans de nombreuses communes les lois électorales ne furent pas respectées, et il n’y eut un changement de maire qu’en décembre 1792, sauf démission.
  8. Il ne peut s’agir du conseil municipal élu en février 1794 puisque Jean Le Jour n’y figure plus.
  9. Aux élections municipales d’Elliant en décembre 1792 il n’y eut que 21 électeurs … pour 20 postes à pourvoir ! A Kernével il n’y avait que trois personnes qui savaient lire et écrire…
  10. Un document du 22 avril 1798 inverse les rôles. Cependant la délibération du conseil municipal du 23 janvier 1801 auquel est convié Jean Nicolas «agent» pour expliquer la situation financière de la commune prouve que c’est bien lui qui était l’agent municipal en 1798.
  11. Dans le recensement de 1790 figurent Joseph François Mahé, cultivateur à Kdévot, 26 ans, citoyen actif, et son frère François, 22 ans. Peut-être pourrait-il s’agir de l’un d’eux.

 

Dossier réalisé par Jean-François Douguet - Keleier 68 - juin 2011

 

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