Jean-Marie Déguignet : enfance

De sa naissance en 1834 à son départ pour l'armée vers 1855, Jean-Marie Déguignet a "fait du chemin". En une vingtaine d'années, il a vécu dans cinq ou six lieux différents. Enfant, il a suivi ses parents dans leur effort pour survivre, déménageant là où l'on voudrait bien les employer. Son temps libre est occupé à mendier. Il est marqué par divers accidents physiques. Très tôt, il se fait employer comme vacher, commis, domestique... Norbert Bernard, qui a travaillé à l'édition complète d'Histoire de ma vie de Déguignet, retrace ce chemin chaotique, reliant archives (cadastre, actes notariés, archives personnelles...), texte publié (Mémoires d'un paysan bas-breton) et manuscrits.

 

La naissance à Killihouarn en Guengat

Jean-Marie Déguignet est né 19 juillet 1834, à Kilihouarn-Guengat, d'un père fermier (RdP, p. 830). En septembre 1834, la famille déménage rue Vily [=rue de la Providence aujourd’hui], à Quimper. Puis dans un penn-ty au Guélenec, à Ergué-Gabéric (RdP, p. 830) [Ils arrivent au Quellennec entre les recensements de 1836 et de 1841] 

Dans le voisinage, au Guélennec, habitent :
• N., tisserand (« Vie Courte », p. 2). Il s'agit d'Hervé Barré, époux de Mauricette Bléogat. Il est encore vivant lors du 5e accident « mortel » de Déguignet (manuscrits, p. 443).
• N., tailleuse, qui apprend à lire et écrire (« Vie Courte », p. 7).
• N., idiot, fils du vieux Poher (« Vie Courte », p. 8 et 11). Il s'agit de N. Poher.
• Le vieux Poher : précédemment fermier à Keruel. Ayant été foudroyé, il ne peut plus travailler et déménage dans la ferme de Ty-Glas au Guélennec, qui est « la dernière ferme », donc l’une des extrémités du hameau (« Vie Courte », p. 11). Il s'agit de Michel Poher, dit Pach kozh, 69 ans en 1846, veuf d’Anne Le Littré, qui vit alors chez son fils Yves.
• N., frère aîné de l’idiot (« Vie Courte », p. 10). Il s'agit d'Yves, cultivateur en 1846.
• Le maire d’Ergué-Gabéric d’alors, qui habitait au Guélennec (Mémoires…, p. 62). Il s'agit de Pierre Nédellec (Mémoires…, p. 62, note 40).
• Téo Phillipe, le gros Philippe (Mémoires…, p. 63). On trouve dans l’ancien cadastre d'Ergué-Gabéric Jean et Hervé Philippe, au Quéllennec.
• Un nommé Péron, riche propriétaire (manuscrits, p. 395-396).
+ Pach Coz, Vieux Pache : bien avant Déguignet, à Mez anaonic, sur route Quimper-Coray, il était détrousseur de voyageurs (cf. Histoire de Langolen).
• Propriétaire Griffones (Mémoires…, p. 38).
• À Kernoas : Ropart (manuscrits, p. 412).

 

Le début de la mendicité

Fin 1843 survient le 3e accident de Déguignet (Mémoires…, p. 43). Au printemps 1844, il devient mendiant. (Mémoires…, p. 44). Après 6 semaines, il abandonne son « professeur » en mendicité (Mémoires…, p. 45). Il mentionne deux fripouilles. Il trouve un compagnon de mendicité à peu près de son âge (Mémoires…, p. 47). En juillet 1845 a lieu la maladie des pommes de terre (Mémoires…, p. 48).

 

Le déménagement à Ty Forn, en Ergué-Gabéric

1845, « à la saint Michel suivante », la famille déménage de du Ty Forn, pour une autre maison, près de celle de l’homme au chat noir (Mémoires…, p. 56). Il s'agit probablement de la maison cotée A 139 dans l’ancien cadastre (1836, Ergué-Gabéric), localisée entre les parcelles A 138 [Liors Forn] et A 140 [Liors ar Forn]. Sur l’ancien cadastre, on reconnaît la forme d’un four au bout du bâtiment.La même année, on célèbre sa 1ere communion (Mémoires…, p. 56). Dès lors, il ne va plus mendier, mais aide son père (RdP, 15 décembre 1904, p 833). Même année encore, il subit un 4e accident « mortel » (Mémoires…, p. 59) au Stang Viannic : l’ancien cadastre donne les parcelles Stan-c/-g Vian(n)ic en : B 339, B 0341, B 0342, B 0343, B 0351 ; et Liors Stanc Vianic en B 0348.

 

Un grave accident

En 1847,  à 13 ans, Déguignet trouve à se « placer comme troisième domestique dans une ferme » (RdP, 15 décembre 1904, p. 833), mais dans quelle ferme ?). Il tombe malade, retourne chez lui et parvient à l’article de la mort (RdP, 15 décembre 1904, p 833). L'année suivante (Mémoires…, p. 61), c'est la révolution de 1848 (Mémoires…, p. 61). Louis-Philippe est renversé, provoquant l'avènement de la 2e République et l'arrivée de Napoléon III à la présidence. Le maire d’Ergué-Gabéric d’alors, qui habitait au Guélennec, est Pierre Nédellec (Mémoires…, p. 62, note 40). En 1848, le maire fait envoyer Déguignet à l’hospice de Quimper pour soigner sa blessure. (Mémoires…, p. 63-64). Guéri, Jean-Marie retourne mendier (Mémoires…, p. 68).

 

Un nouveau déménagement à Lézergué, en Ergué-Gabéric

Puis, à une année non mentionnée (« en ce temps là »), il déménage près de Lezergué, dans un des trois penn-ty qui s’y trouvent alors. Le propriétaire est Christoc'h Du (manuscrits, p. 346), soit Christophe Crédou. Son père y travaille, ainsi que dans une ferme voisine (manuscrits, p. 348-349). Aapparemment, ce serait à « Kervelen ». Depuis au moins 1846, les parents et enfants Déguignet demeurent à Lezergué, et cette année-là, ils sont qualifiés de mendiants, le père étant tout de même qualifié de journalier.

• Christophe Crédou :
 Il a 5 enfants : 4 filles et 1 garçon (manuscrits, p. 347).
 Il a acquis le château et la métairie de Lezergué, ainsi que leurs dépendances, le 26 septembre 1838, pour 5.400 fr. de M. Jean Etienne Gautier et André Prosper du Bois, tous deux négociants et demeurant à Brest. Lui-même et sa femme, Barbe Leroux, habitent alors au bourg (cf. archives Lezergué).
 Il devait avoir des moyens financiers importants : en 1835 (ancien cadastre), il possédait lui-même cinq parcelles au bourg et avec ses frères, ce sont 42 parcelles au bourg et 25 à Kergaradec qui leur appartiennent. On trouve alors déjà un Crédou à Lezergué : Jérôme Crédou.
 Son gendre fut trésorier de la fabrique de Kerdévot (Mémoires…, p. 73).

 

Vacher à "Kerleven"/Kervreyen, en Ergué-Gabéric

Déguignet devient vacher (manuscrits, p. 349 et suiv.) à Kervelen (manuscrits, p. 437). S'agit-il de Kervreyen ? Perd-il son emploi du fait de son 5e accident « mortel » ? Suite à celui-ci, il retourne aider son père (manuscrits, p. 444 : « Lorsque je fus à peu près rétabli, j'allais en journée avec mon père ou à l'aider dans ses marchés quand il en trouvait »). La ferme de « Kervelen » est tenue par un prénommé Jean (manuscrits, p. 350) : « Eru yan dar gherr (…) Voilà Jean qui arrive » (manuscrits, p. 350), lequel meurt à cette époque (manuscrits, p. 352). Cette ferme est proche de Plas an dañs (manuscrits, p. 408). Il y a au bas de celle-ci un courtil avec une source (manuscrits, p. 437-438). Il semble que les Déguignet habitent alors à Kervelen, les hommes dans le « ty diavez » (manuscrits, p. 366). Son père a quitté Lezergué pour retourner vivre au Quélennec, « dans la même maison que nous avions quittée pour aller là-bas », lorsque le fils a son 5e accident « mortel » à Kervelen (manuscrits, p. 438).

 

Domestique à Griffonès, en Ergué-Gabéric

En 1851, Déguignet a 17 ans. Il est employé comme « domestique en segond » à Griffonnes (manuscrits, p. 444). Et c’est se rendant de là à la messe du dimanche à Quimper, qu’il trouve à se faire employer à Kermahonec (manuscrits, p. 446 et suiv.).

 

Commis de ferme et employé de la ferme-école de Kermahonec, en Kerfeunteun

Entre 1849 et 1853 il travaille dans « trois ou quatre fermes » (RdP, 15 décembre 1904, p. 835-836). Puis en 1854, il va travailler à Kermahonec, chez M. Olive. Kermahoenec est alors une ferme-école du Likès où monsieur Olive est professeur (consulter ADF, 7 M 203). Ce dernier ne parle pas breton, mais sa femme qui le parle sert d’interprète (Mémoires…, p. 86 et 101). La mère de Madame Olive y vit aussi (Mémoires…, p. 99). Et on trouve parmi les vieux journaliers de la ferme un ancien soldat de Louis-Philippe, originaire de Briec.

 

Domestique à Kerloch, en Kerfeunteun

Année 1854, Jean-Marie part travailler à Kerloch (RdP, 15 décembre 1904, p. 847), chez M. Danion, maire de Kerfeunteun (Mémoires…, p. 9, note 82). Pour l’année, il dit d’une part : « A la fin de l’année, ayant 19 ans passés… » (RdP, 15 décembre 1904, p. 847) et d’autre part « le premier janvier 1854, j’allais comme domestique chez le maire de Kerfeunteun » (Mémoires…, p.104-105).

 

Le départ pour l'armée

Il part enfin s’engager dans l’armée.

 

Notes de Norbert Bernard