Jean-Marie Déguignet : enfance

De sa naissance en 1834 à son départ pour l'armée vers 1855, Jean-Marie Déguignet a "fait du chemin". En une vingtaine d'années, il a vécu dans cinq ou six lieux différents. Enfant, il a suivi ses parents dans leur effort pour survivre, déménageant là où l'on voudrait bien les employer. Son temps libre est occupé à mendier. Il est marqué par divers accidents physiques. Très tôt, il se fait employer comme vacher, commis, domestique... Norbert Bernard, qui a travaillé à l'édition complète d'Histoire de ma vie de Déguignet, retrace ce chemin chaotique, reliant archives (cadastre, actes notariés, archives personnelles...), texte publié (Mémoires d'un paysan bas-breton) et manuscrits.

 

La naissance à Killihouarn en Guengat

Jean-Marie Déguignet est né 19 juillet 1834, à Kilihouarn-Guengat, d'un père fermier (RdP, p. 830). En septembre 1834, la famille déménage rue Vily [=rue de la Providence aujourd’hui], à Quimper. Puis dans un penn-ty au Guélenec, à Ergué-Gabéric (RdP, p. 830) [Ils arrivent au Quellennec entre les recensements de 1836 et de 1841] 

Dans le voisinage, au Guélennec, habitent :
• N., tisserand (« Vie Courte », p. 2). Il s'agit d'Hervé Barré, époux de Mauricette Bléogat. Il est encore vivant lors du 5e accident « mortel » de Déguignet (manuscrits, p. 443).
• N., tailleuse, qui apprend à lire et écrire (« Vie Courte », p. 7).
• N., idiot, fils du vieux Poher (« Vie Courte », p. 8 et 11). Il s'agit de N. Poher.
• Le vieux Poher : précédemment fermier à Keruel. Ayant été foudroyé, il ne peut plus travailler et déménage dans la ferme de Ty-Glas au Guélennec, qui est « la dernière ferme », donc l’une des extrémités du hameau (« Vie Courte », p. 11). Il s'agit de Michel Poher, dit Pach kozh, 69 ans en 1846, veuf d’Anne Le Littré, qui vit alors chez son fils Yves.
• N., frère aîné de l’idiot (« Vie Courte », p. 10). Il s'agit d'Yves, cultivateur en 1846.
• Le maire d’Ergué-Gabéric d’alors, qui habitait au Guélennec (Mémoires…, p. 62). Il s'agit de Pierre Nédellec (Mémoires…, p. 62, note 40).
• Téo Phillipe, le gros Philippe (Mémoires…, p. 63). On trouve dans l’ancien cadastre d'Ergué-Gabéric Jean et Hervé Philippe, au Quéllennec.
• Un nommé Péron, riche propriétaire (manuscrits, p. 395-396).
+ Pach Coz, Vieux Pache : bien avant Déguignet, à Mez anaonic, sur route Quimper-Coray, il était détrousseur de voyageurs (cf. Histoire de Langolen).
• Propriétaire Griffones (Mémoires…, p. 38).
• À Kernoas : Ropart (manuscrits, p. 412).

 

Le début de la mendicité

Fin 1843 survient le 3e accident de Déguignet (Mémoires…, p. 43). Au printemps 1844, il devient mendiant. (Mémoires…, p. 44). Après 6 semaines, il abandonne son « professeur » en mendicité (Mémoires…, p. 45). Il mentionne deux fripouilles. Il trouve un compagnon de mendicité à peu près de son âge (Mémoires…, p. 47). En juillet 1845 a lieu la maladie des pommes de terre (Mémoires…, p. 48).

 

Le déménagement à Ty Forn, en Ergué-Gabéric

1845, « à la saint Michel suivante », la famille déménage de du Ty Forn, pour une autre maison, près de celle de l’homme au chat noir (Mémoires…, p. 56). Il s'agit probablement de la maison cotée A 139 dans l’ancien cadastre (1836, Ergué-Gabéric), localisée entre les parcelles A 138 [Liors Forn] et A 140 [Liors ar Forn]. Sur l’ancien cadastre, on reconnaît la forme d’un four au bout du bâtiment.La même année, on célèbre sa 1ere communion (Mémoires…, p. 56). Dès lors, il ne va plus mendier, mais aide son père (RdP, 15 décembre 1904, p 833). Même année encore, il subit un 4e accident « mortel » (Mémoires…, p. 59) au Stang Viannic : l’ancien cadastre donne les parcelles Stan-c/-g Vian(n)ic en : B 339, B 0341, B 0342, B 0343, B 0351 ; et Liors Stanc Vianic en B 0348.

 

Un grave accident

En 1847,  à 13 ans, Déguignet trouve à se « placer comme troisième domestique dans une ferme » (RdP, 15 décembre 1904, p. 833), mais dans quelle ferme ?). Il tombe malade, retourne chez lui et parvient à l’article de la mort (RdP, 15 décembre 1904, p 833). L'année suivante (Mémoires…, p. 61), c'est la révolution de 1848 (Mémoires…, p. 61). Louis-Philippe est renversé, provoquant l'avènement de la 2e République et l'arrivée de Napoléon III à la présidence. Le maire d’Ergué-Gabéric d’alors, qui habitait au Guélennec, est Pierre Nédellec (Mémoires…, p. 62, note 40). En 1848, le maire fait envoyer Déguignet à l’hospice de Quimper pour soigner sa blessure. (Mémoires…, p. 63-64). Guéri, Jean-Marie retourne mendier (Mémoires…, p. 68).

 

Un nouveau déménagement à Lézergué, en Ergué-Gabéric

Puis, à une année non mentionnée (« en ce temps là »), il déménage près de Lezergué, dans un des trois penn-ty qui s’y trouvent alors. Le propriétaire est Christoc'h Du (manuscrits, p. 346), soit Christophe Crédou. Son père y travaille, ainsi que dans une ferme voisine (manuscrits, p. 348-349). Aapparemment, ce serait à « Kervelen ». Depuis au moins 1846, les parents et enfants Déguignet demeurent à Lezergué, et cette année-là, ils sont qualifiés de mendiants, le père étant tout de même qualifié de journalier.

• Christophe Crédou :
 Il a 5 enfants : 4 filles et 1 garçon (manuscrits, p. 347).
 Il a acquis le château et la métairie de Lezergué, ainsi que leurs dépendances, le 26 septembre 1838, pour 5.400 fr. de M. Jean Etienne Gautier et André Prosper du Bois, tous deux négociants et demeurant à Brest. Lui-même et sa femme, Barbe Leroux, habitent alors au bourg (cf. archives Lezergué).
 Il devait avoir des moyens financiers importants : en 1835 (ancien cadastre), il possédait lui-même cinq parcelles au bourg et avec ses frères, ce sont 42 parcelles au bourg et 25 à Kergaradec qui leur appartiennent. On trouve alors déjà un Crédou à Lezergué : Jérôme Crédou.
 Son gendre fut trésorier de la fabrique de Kerdévot (Mémoires…, p. 73).

 

Vacher à "Kerleven"/Kervreyen, en Ergué-Gabéric

Déguignet devient vacher (manuscrits, p. 349 et suiv.) à Kervelen (manuscrits, p. 437). S'agit-il de Kervreyen ? Perd-il son emploi du fait de son 5e accident « mortel » ? Suite à celui-ci, il retourne aider son père (manuscrits, p. 444 : « Lorsque je fus à peu près rétabli, j'allais en journée avec mon père ou à l'aider dans ses marchés quand il en trouvait »). La ferme de « Kervelen » est tenue par un prénommé Jean (manuscrits, p. 350) : « Eru yan dar gherr (…) Voilà Jean qui arrive » (manuscrits, p. 350), lequel meurt à cette époque (manuscrits, p. 352). Cette ferme est proche de Plas an dañs (manuscrits, p. 408). Il y a au bas de celle-ci un courtil avec une source (manuscrits, p. 437-438). Il semble que les Déguignet habitent alors à Kervelen, les hommes dans le « ty diavez » (manuscrits, p. 366). Son père a quitté Lezergué pour retourner vivre au Quélennec, « dans la même maison que nous avions quittée pour aller là-bas », lorsque le fils a son 5e accident « mortel » à Kervelen (manuscrits, p. 438).

 

Domestique à Griffonès, en Ergué-Gabéric

En 1851, Déguignet a 17 ans. Il est employé comme « domestique en segond » à Griffonnes (manuscrits, p. 444). Et c’est se rendant de là à la messe du dimanche à Quimper, qu’il trouve à se faire employer à Kermahonec (manuscrits, p. 446 et suiv.).

 

Commis de ferme et employé de la ferme-école de Kermahonec, en Kerfeunteun

Entre 1849 et 1853 il travaille dans « trois ou quatre fermes » (RdP, 15 décembre 1904, p. 835-836). Puis en 1854, il va travailler à Kermahonec, chez M. Olive. Kermahoenec est alors une ferme-école du Likès où monsieur Olive est professeur (consulter ADF, 7 M 203). Ce dernier ne parle pas breton, mais sa femme qui le parle sert d’interprète (Mémoires…, p. 86 et 101). La mère de Madame Olive y vit aussi (Mémoires…, p. 99). Et on trouve parmi les vieux journaliers de la ferme un ancien soldat de Louis-Philippe, originaire de Briec.

 

Domestique à Kerloch, en Kerfeunteun

Année 1854, Jean-Marie part travailler à Kerloch (RdP, 15 décembre 1904, p. 847), chez M. Danion, maire de Kerfeunteun (Mémoires…, p. 9, note 82). Pour l’année, il dit d’une part : « A la fin de l’année, ayant 19 ans passés… » (RdP, 15 décembre 1904, p. 847) et d’autre part « le premier janvier 1854, j’allais comme domestique chez le maire de Kerfeunteun » (Mémoires…, p.104-105).

 

Le départ pour l'armée

Il part enfin s’engager dans l’armée.

 

Notes de Norbert Bernard


Jean-Marie Déguignet : inventaire des textes

Cahiers premiere edition
A. Publications

1. Mémoires d’un paysan bas-breton
La Revue de Paris : n°34 - 15/12/1904, pages 826-860.
N°35 - 01/01/1905, pages 153-184.
N°36 - 15/01/1905, pages 381-404.
N°37 - 01/02/1905, pages 605-651.
(Préface d’Anatole Le Braz)

2. Contes et légendes populaires de la Cornouaille bretonne
Bulletin de la Société archéologique du Finistère.Tome LXXXIX. 1963. Pages 83-103.
(Préface de Louis Ogès)

3. Contes et légendes du Grand Ergué
Commission extra-municipale de recherches historiques. Octobre 1984. 32 pages. Illustrations de Laurent Quévilly.

4. Mémoires d’un paysan bas-breton
Première édition, An Here. 1998. 464 pages.
(Edition établie par Bernez Rouz).
23 ème édition, Arkae, 2022.

5. Contes et légendes de Basse-Cornouaille
Editions An Here. 1998. 168 pages. Illustrations de Laurent Quevilly.

6. Rimes et révoltes
Editions Blanc silex. 1999. 96 pages.

B. Description des manuscrits

1. Vie courte
4 cahiers d’écoliers de 50 pages, au format 17,2 cm x 22,5 cm. Le cahier n°1 est perdu.
- Cahier n°2 : paginé de 1 à 44. Les 25 premières pages ne se trouvent pas dans l’Histoire de ma vie. Par contre, les suivantes correspondent mot pour mot au texte qui fait l’objet de la présente édition (Mss pages 274-299). Le texte réécrit n’est pas de la main de Jean-Marie Déguignet. Ce travail fidèle de transcription nous a convaincu que ces 25 pages sont la transcription d’une partie du premier cahier disparu.
- Cahier n°3 : paginé de 1 à 44. Les pages 1-41 sont une retranscription du manuscrit p.p. 299-354. Les pages 42-44 correspondent au manuscrit pages 366-372.
- Cahier n° 4 : paginé de 1 à 44.
Pages 1-17. correspondent au manuscrit p 3.72-3.93.
Pages 17-35 correspondent au manuscrit 4.29-4.56.
Pages 35-43 correspondent au manuscrit 4.71-4.83.
Pages 43- 44 correspondent aux pages 4.85-4.86.
- Cahier N° 5 : paginé de 1 à 24.
Pages 1-24. correspondent au manuscrit p 4.86-4.96 ; 5.01-5.26.
La couverture porte une signature : Deguignet. Peut être s’agit il de son fils aîné ?

2. Explication des mythes
Cahier n° 26 : il porte les inscriptions suivantes : « 26e cahier. Explication des mythes ». Paginé de 26.01 à 26.47.
Cahier n° 27 : il porte les inscriptions suivantes : « Deguignet. 27e cahier. Explication des mythes ». Paginé 27.01 à 27.106.
Cahier n° 28 : il porte les inscriptions suivantes : « Deguignet, 28eme cahier. Explication des mythes ».Paginé 28.01 à 29.20.

3. Jésus, fils ainé de Marie Joachim, dernier roi des Juifs, sa vie, ses aventures et sa mort, par Déguignet J.M.
Cahier n° 1 : 48 pages.
Cahier n° 2 : 48 pages.
Cahier n° 3 : 100 pages.
Cahier n° 4 : 48 pages.
Cahier n° 5 : 49 pages.
Cahier n° 6 : 49 pages.
Cahier n° 7 : 48 pages.
Cahier n° 8 : 49 pages.
Cahier n° 9 : 43 pages dont deux blanches : il est signé au bas de la page 39 « Duguines-Deguignette, ex-mendiant, ex-vacher, ex-valet de ferme, ex-militaire et ex-cultivateur ». Il est suivi de quatre pages en forme de post scriptum.

4. Mon testament
Ce cahier de 57 pages, contient diverses pièces poèmes ou lettres.
-« Vers adressé à Le Braz Anatole qui m’a volé, le 1er janvier 1898, 24 manuscrits de mes mémoires ». 5 pages.
- « Terre d’Armor ». Poème 3 pages..
- « Le Guyader, dit Paban, est poète accompli … ». Poème 3 pages.
- « À Legal, curé d’Ergué-Armel … ». Poème 4 pages.
- « En réponse aux vers du poète Le Braz sur la ville de Quimper, lors de la cavalcade du 9 avril 1899, lu dans Le Finistère aujourd’hui 10 avril ». Poème 2 pages.
- « Lettre adressée à Calvez Christophe, le 18 avril, pour répondre aux terribles questions implicitement exposées entre trois paysans bretons le 14 avril, au Café de la marine à Quimper ». 6 pages.
- « Terre d’Armor (Lettre envoyée au président de l’exposition bretonne à Paris le 12 avril 1900) ». Cette lettre contient le poème « Terre d’Armor » suivit d’un courrier de quatre pages.

5. Testament moral du sieur Déguignet J.-M., paysan bas-breton de 3e classe.
Cahier de 26 pages.

6. Copie de lettres.
Cahier incomplet, paginé de 9 à 36. Il contient diverses correspondances.
- « Lettre adressée à l’inspecteur d’académie, au sujet de Le Braz, professeur au lycée de Quimper, le 5 octobre 1898 ». 4 pages.
- « Poème adressé au triste sire Le Braz Anatole, le premier janvier 1899 ». 5 pages.
- « (Au bord de la mer). A Paban, poète, rédacteur du Finistère ». 8 pages. Lettre datée de Quimper le 13 janvier 1899.
- « A Monsieur Malherbe de la Boixière ». Poème. 2 pages.
- « Pour la canaille Malherbe de la Boëxière ». Poème de 32 vers, suivis de huit pages en prose, datées du 19 janvier 1899.

7. Notes
Cahier de 50 pages, contenant diverses considérations sur les Évangiles.

C. Manuscrits non retrouvés

1 . Première version des Mémoires d’un paysan bas-breton. 24 cahiers de 40 pages, remis à Anatole Le Braz et partiellement publiés dans La Revue de Paris. Cf. Mss p. 2581.
2. Traité pour élever les abeilles. Ouvrage en breton en réponse au concours de la revue hebdomadaire Kroaz ar Vretoned. Cf. Kroaz ar Vretoned n°281, 4 octobre 1904.


Jean-Marie Déguignet : L'aventure des manuscrits perdus

Cahiers manuscrits de Déguignet

Histoire d'un succès

Lancé discrètement lors du festival Étonnants voyageurs à Saint-Malo, en mai 1998, les Mémoires d'un Paysan Bas-Breton, retrouvés dans un HLM quimpérois, se retrouve 14 éditions plus tard parmi les meilleures ventes françaises. L'engouement des Bretons pour ce témoignage particulièrement sévère sur leur mœurs du siècle dernier n'était pourtant pas évident. Mais Déguignet est un pauvre parmi les pauvres, et sans doute un des seuls à témoigner de sa condition, dans un siècle ou l'écriture était réservé aux nantis. Les traditions familiales vibrent encore des dures réalités de la vie, il y a tout juste cinquante ans. Déguignet est la voix des sans-voix, c'est pour cela qu'il séduit.


La redécouverte des manuscrits

Tout a commencé en 1979 : une poignée de passionnés d'histoire locale réunis dans l'association Arkae, s'est attelée à créer un fond d'archives de la commune d'Ergué-Gabéric, aux portes de Quimper. De 2500 habitants en 1962, cette commune dépasse les 7000 en cette fin de siècle. Il y avait urgence à collecter la mémoire d'une communauté où l'autochtone était devenu minorité.

C'est dans La Fin des terroirs, la brillante synthèse de l'américain Eugen Weber sur la modernisation de la France rurale (1870-1914), que le hasard nous fait découvrir une citation de Jean-Marie Déguignet, tirée des Contes et légendes de Basse-Cornouaille, publiés par Louis Ogès dans le Bulletin de la Société archéologique du Finistère. Et c'est là, à la page 83 d'un tome grisâtre et peu engageant, portant le millésime 1963, que Louis Ogès nous fait découvrir un "humble bouquet de fleurs ancestrales, nées de l'âme populaire bretonne" : cinquante pages de contes et légendes. Rien de plus banal, me direz-vous, dans notre Bretagne bretonnante, mais d'entrée, notre Déguignet détonne : "Les conteurs se sont moqué des savants... pour un verre d'eau-de-vie, conteurs et conteuses inventaient des légendes issues de leur seule imagination". Le ton est donné : Louis Ogès nous apprend que ce personnage aux opinions aussi tranchées a écrit le récit de sa vie avec cette même verve caustique, et ceci en 26 cahiers de 100 pages. C'en est trop ! Après la délectation de la découverte venait le temps des nuits blanches : où étaient donc passés ces manuscrits sulfureux ?

Cet échantillon, l'association Arkae décide de le faire connaitre des gabéricois, le mêlant aux légendes sur la commune rapportées par Louis Le Guennec, et publie les Contes et légendes du Grand Ergué. Cette publication tombe entre les mains d'une petite-fille de Jean-Marie Déguignet, qui se rappelle qu'une cousine avait remis quelques cahiers à Louis Ogès, mais aussi que sa mère, habitant Paris, avait contacté Anatole Le Bras au sujet des écrits de Jean-Marie publiés dans une revue parisienne. Renseignement pris, il s'agit de la Revue de Paris et l'article s'intitule Mémoires d'un paysan bas-breton. Anatole Le Braz, alors au faîte de sa gloire, y présente l'auteur en termes dithyrambiques : "C'était en 1897, un soir de juin..."

Et on découvre que notre Deguignet, tour à tour, mendiant, vacher, domestique, apprend le français par lui même. Soldat, il fait la campagne de Crimée ; lors d'une permission à Jérusalem, il perd la foi, révolté par les pratiques marchandes du pèlerinage. Devenu caporal, il participe à la guerre d'Italie. Puis plus rien, la Revue de Paris interrompt l'édition des Mémoires. Les cent trente pages de la Revue de Paris, essentiellement consacrées à ses campagnes militaires, nous avaient fait savourer un hydromel au goût sauvage ; nous avions collecté les premiers indices, restait à trouver le Graal.

Quelques sondages dans le puzzle familial nous laissaient sceptiques sur l'existence de ces cahiers, dont personne n'avait entendu parler. Il a fallu le coup de pouce d'un journaliste d'Ouest-France, Laurent Quevilly - qu'il soit ici remercié - pour qu'un appel à retrouver le manuscrit porte ses fruits : C'est dans un immeuble HLM de Kermoysan à Quimper que dormaient les précieux écrits. Grâce à l'amabilité des descendants de Jean-Marie Déguignet, grâce à la diligence de la municipalité d'Ergué-Gabéric, ce sont 41 cahiers de 100 pages qui ont pu être photocopiés.

La saga de Jean-Marie Déguignet pouvait donc être complétée. A son retour de la guerre d'Italie, il cherche vainement du travail en Bretagne et signe alors un nouvel engagement. Cette fois-ci sa nouvelle carrière militaire le conduit en Algérie, puis au Mexique. Démobilisé en 1868, il revient au pays comme paysan, assureur, débitant de tabac ; ses opinions républicaines et laïques le font traquer par les cléricaux. Il termine sa vie dans la misère, dans des taudis quimpérois. C'est là, dans les années 1890, qu'il écrit son histoire, son existence de "paysan de neuvième classe".

Seulement, problème, le Récit de ma vie, qui est entre nos mains, n'est pas le même que le texte de la Revue de Paris. A la page 1467 du manuscrit, Jean-Marie Déguignet explique qu'Anatole Le Braz lui a offert 100 francs pour éditer ses Mémoires. Plusieurs années plus tard, ne voyant toujours rien venir, il crie au vol, pense à un complot des "monarchisto-nationalisto-cléricafards bretons", et réécrit le récit de sa vie. C'est cette nouvelle version que nous possédons. Nous continuons à enquêter sur le devenir des manuscrits de la première version.

 

    Restait à les mettre à la disposition du public

Comme à Anatole Le Braz, comme à Louis Ogès, comme aux responsables de la Revue de Paris, la tâche nous est apparue particulièrement ardue. Le français de l'autodidacte Déguignet est surprenant, cousu de bretonismes, émaillé de citations en latin, en italien, en espagnol, truffé de digressions, mais riche de quantité d’expressions populaires dans son savoureux parler de Cornouaille. Il aurait fallu réécrire complètement ces Mémoires, 2 600 pages de cahiers d'écoliers ! Déjà la Revue de Paris avait renoncé, seules cent trente pages revues et corrigées, vraisemblablement par Anatole Le Braz, avaient été éditées. Mais cette version remaniée, susceptible de recueillir les faveurs des amateurs de romans-feuilletons, ne peut en aucun cas servir de référence à des lecteurs exigeants, formés aux écoles des sciences humaines.

L'option retenue fut de taper le texte petit à petit. Grâce à une chaîne de bénévoles, la bibliothèque municipale d'Ergué-Gabéric héritait d'une version accessible des 26 cahiers existants qui constituent les Mémoires de Déguignet. D'autres cahiers de moindre intérêt "traitant de philosophie, de politique, de sociologie et même de mythologie" restent encore à l'état de manuscrits.

Rapidement toutefois, on s'aperçut que les lecteurs privilégiés renonçaient à lire cette intégrale. L'auteur, qui écrivait dans des conditions particulièrement pénibles au tournant du siècle — il vivait dans un taudis, sur un matelas de fougères — avait l'esprit obscurci par le délire de persécution : il en voulait aux nobles, aux curés, aux politiciens, causes de tous ses malheurs. Il en voulait surtout à Anatole Le Braz, "voleur" de ses manuscrits. Ses écrits sont alourdis par des considérations anticléricales, par des digressions sur la vie politique locale ou nationale, par des anathèmes contre ses ennemis, le tout au fil de la plume dans un désordre indescriptible. Ces circonvolutions permanentes à partir du neuvième cahier rendent le récit tortueux. C'est pourquoi nous avons décidé de proposer aux éditions An Here une continuité d'extraits des aventures du citoyen Déguignet, de façon à rendre le récit cohérent et facilement accessible, sans trahir l'esprit ni la lettre de l'auteur.

Car le témoignage reste d'une force inégalée. C'est un document unique sur la société rurale bretonne du dix-neuvième siècle. Déguignet ne s'inscrit pas dans la tradition des prêtres, des nobles et des intellectuels qui ont magnifié la tradition populaire. De La Villemarqué, Souvestre, Luzel, Le Braz et bien d'autres, sont à mille lieues des préoccupations de notre autodidacte. Il s'agit, pour la première fois, du témoignage direct d'un pauvre parmi les pauvres : mendiant, vacher, soldat, sergent, cultivateur, commerçant, miséreux, aliéné une destinée féroce, dans laquelle les plaisirs de la vie occupent peu de place. Ces mémoires d'un écorché vif remettent en cause nombre d'idées reçues sur l'âge d'or de la civilisation rurale de Basse-Bretagne.

Le soldat Déguignet est aussi particulièrement incisif sur la vie militaire. Guerre de Crimée, guerre d'Italie, guerre d'Algérie, guerre du Mexique, il aura vécu en quatorze ans toutes les expéditions du Second Empire. Il nous livre à travers son expérience de caporal et de sergent, une plongée décapante à l'intérieur de l'armée française, un contrepoint salutaire aux comptes-rendus lénifiants écrits par les généraux et les historiens officiels.

Le plus dérangeant chez Déguignet est sans doute son parti pris anticlérical. C'est un voyage à Jérusalem qui a détourné définitivement de la religion l'élève modèle du catéchisme. "Bouffeur" de curé, ses arguments et ses anathèmes prêtent à sourire aujourd'hui, mais à l'époque où il écrivait le récit de sa vie, le Finistère était quasiment en guerre de religion. De 1902 à 1905, la politique laïque et anticléricale du gouvernement Combes était vivement contestée en Bretagne. Les manifestations contre l'expulsion des congrégations, les protestations contre l'interdiction de l'usage du breton dans la prédication, rendaient le climat particulièrement tendu. Déguignet, le républicain athée, ne pouvait guère rester l'arme au pied dans un tel débat. Il inondera les personnalités et les journaux locaux de lettres d'injures, lettres reproduites intégralement dans le texte et de peu d'intérêt. Mais ses démêlés avec le clergé local sont vifs, et une fois grattées les imprécations, le texte évoque d'une façon particulièrement savoureuse la difficulté d'être libre penseur dans une société entièrement régie et contrôlée par la toute puissance de l'Eglise.

Reste enfin cette polémique avec Anatole Le Braz. Le célèbre écrivain rencontre notre paysan à Quimper en 1897. A la lecture du texte, c'est le choc : "J'ouvris incontinent le premier cahier. Ce me fut une révélation. Je ne m'arrachai plus au charme puissant et fruste de ces confidences d'un Breton du peuple qu'après les avoir épuisées ". Il offre 100 francs à Déguignet et promet d'éditer son manuscrit. Pour des raisons qu'on ignore, ce n'est qu'en Décembre 1904, sept ans plus tard !, que La Revue de Paris commence à publier les premières pages signées Déguignet. Pendant sept ans, aucune nouvelle ; par contre Le Braz publie des livres à succès comme Les Légendes de la mort. Déguignet est persuadé que l'écrivain a détruit son travail à cause de ses idées anticonformistes, ou pire encore, il aurait pillé son manuscrit pour produire sa propre littérature, d'où sa vindicte. La publication des premières pages de ses Mémoires quelques semaines avant sa mort sera un véritable baume à ses souffrances morales.

D'aucuns s'étonneront de la violence des propos de Déguignet envers ses propres compatriotes bretons. Peu trouvent grâce à ses yeux. Pourfendeur du conservatisme, de la routine, sensible aux thèses anarchistes et révolutionnaires, il s'est retrouvé en porte-à-faux par rapport à la société de son temps. Ce journal d'un écorché vif (Déguignet signifie "l'écorché" !), fait penser parfois aux confessions de Jean-Jacques Rousseau. Même si Déguignet irrite, son récit est vif, rebondit en permanence et se lit comme un véritable roman d'aventures. Sa grande qualité est certainement la sincérité, et par là il séduit. Nulle bibliothèque éprise de vérité ne pourra faire l'impasse sur Déguignet, témoin exceptionnel, critique de "la fin des terroirs" et du début de déstructuration de la société traditionnelle bretonne. 

 

Bref historique de la redécouverte des manuscrits
- Juin 1897 : Déguignet remet à Anatole Le Braz la première version manuscrite de ses Mémoires.
- Décembre 1904 à février 1905 : publication de 130 pages, principalement sur les campagnes militaires, dans La Revue de Paris par Anatole Le Braz. Déguignet meurt quelques semaines plus tard.
- 1961 : Mme Stéphan, apparentée à Déguignet, livre 29 cahiers (240 pages des Mémoires + 13 cahiers philo-politico-socio-mythologiques) à Louis Ogès, alors président de la Société archéologique du Finistère (SAF).
- 1963 : publication d’extraits dans le bulletin de la SAF.
- 1979 : création de la commission extramunicipale de recherches historiques avec, notamment, Bernez Rouz, Pierre Faucher, Jean Guéguen et Jean Cognard. Elle travaille à la valorisation du patrimoine gabéricois et, à ce titre, recherche les manuscrits de Déguignet.
- 1980 : Paulette Appert, petite-fille de Déguignet, livre 150 pages à la commission.
- Début octobre 1984 : grâce à un article de Laurent Quévilly dans Ouest-France, fin septembre, l’arrière-petit-fils de Déguignet, René Raphalen (25 juin 1931/12 octobre 2000), habitant à Kermoysan, remet l’ensemble des manuscrits à Arkae (41 cahiers de 100 pages, manque seulement le premier des cahiers). Il faut les photocopier, les assembler, les taper, les relire...
- Mai 98 : après 14 ans de travail, Arkae présente à la presse les Mémoires de Déguignet, condensées en 464 pages et éditées par An Here. De 1990 à 1992, Jean et Annick Thomas ont tapé l’intégrale des manuscrits, soit 907 heures de travail. Puis Bernez Rouz a relu, sélectionné et annoté les extraits pour cette première édition.
- Décembre 98 : Michel Polac chronique le livre dans Charlie-Hebdo et sur France Inter. Les ventes décollent.
- 2001 : publication de l’intégrale, mise au point, notamment, par Norbert Bernard, Gaëlle Martin, Bernez Rouz et Laurent Quévilly.


La grande dame : Linda Asher, traductrice de Déguignet

Le week-end du 4-5 octobre 2003 le centre Déguignet a reçu la visite de la traductrice américaine des Mémoires d’un paysan bas-breton. Le livre sort en anglais en février 2004 à New York. Après l’édition tchèque tout nouvellement publiée, le nom d’Ergué-Gabéric entame un périple mondial.

Linda Asher et Norbert Bernard
« Je veux voir Quimper toute seule. » Linda Asher sait ce qu’elle veut : pas de comité d’accueil, pas de guide, « je veux sentir la ville », dit-elle par téléphone. Jusqu’au 3 octobre dernier, la traductrice américaine de Déguignet n’était qu’une adresse internet pour nous, et les seules relations nouées ne consistaient qu’en des renseignements techniques par rapport à la traduction. Nous avons été flattés qu’elle nous envoie un exemplaire de son travail pour une relecture avant publication. Il y a donc eu un vrai dialogue pour optimiser l’exactitude des mots employés, notamment ceux qui concernent les bretonnismes et le langage militaire. Nous avons eu l’impression que cette traduction n’était pas seulement un travail de commande, il y avait de la passion là-dessous.

Rendez-vous avait été fixé place Saint-Corentin, et la question me brûlait les lèvres : Pourquoi Déguignet ? Linda me confie que, pour cultiver son français, elle regarde régulièrement TV5, la chaîne internationale des télévisions francophones. Elle a vu par hasard le reportage de France 2 sur les Mémoires. Ce qui l’a intéressée, c’est la réussite de ce livre hors des sentiers battus par la grande édition parisienne. « Pour une fois, dit elle, ce ne sont pas les snobs de la capitale qui font les succès littéraires. » Elle a demandé à son éditeur de lui acheter ce livre au salon de Francfort où l’Institut culturel de Bretagne possédait un stand. Comme beaucoup elle se captivera pour les aventures de notre paysan du Guélennec : « Déguignet is unique, not only for being a literate peasant, but also for his skepticism regarding the church ; his interest in science, astronomy, and languages ; and for his keen –often caustic— observations of the world and people around him. » (Déguignet est unique non seulement pour être un paysan cultivé, mais aussi pour son scepticisme envers l’église, son intérêt pour la science, l’astronomie et les langues ; et pour sa vision souvent caustique du monde et de ses contemporains.) Traductrice de Victor Hugo, Georges Simenon et Milan Kundera aux Etats-Unis, Linda Asher vient de recevoir le Prix franco-américain de la traduction pour son travail sur La maladie de Sachs de Martin Winckler. Autant dire que son avis pèse. L’éditeur, Seven Stories Press, à New-York fait confiance à sa traductrice vedette, l’affaire est conclue.

Découvrant la culture bretonne par Déguignet, Linda est inlassable de curiosité sur tout ce qui touche notre patrimoine. Ce qui l’a profondément marquée lors de sa visite du Musée breton, c’est la diversité des costumes et leur richesse, rien ne lui était étranger de nos modes glazik, melenik, bigoudenn, fouesn, les questions fusent, l’intérêt pour notre civilisation rurale est constant elle veut tout savoir tout comprendre.

Au centre Déguignet, Norbert Bernard lui présente les précieux cahiers manuscrits, écrits qui lui sont familiers depuis de longs mois. C’est donc avec beaucoup d’émotion qu’elle tourne les pages des cahiers de notre compatriote. Elle veut tout voir : l’église, le presbytère, Kerdévot, Le Quélénnec, le Stangala, Lézergué ou elle apprécie l’accueil de l’hôte du lieu tout occupé au ramassage de pommes à cidre.

Autre visite obligatoire : la maison d’édition An Here à Plougastel-Daoulas où Cédric Sinou lui présente un florilège de la maison. Elle repart avec des livres pour enfants en breton pour ses petits-fils. Après une balade touristique dans la presqu’île de Crozon, c’est l’émerveillement pour le cimetière marin de Camaret et… les crêpes, sa grande découverte en Bretagne, surtout les crêpes de blé noir.

Mais l’endroit qu’elle ne voulait absolument pas rater, c’est le Yeun Elez. Par chance il fait beau, le Mont-Saint-Michel offre un panorama splendide ; la contrepartie, c’est le marais qui paraît avenant, on a du mal à imaginer la bouche de l’enfer perdue dans les brumes où surgit l’Ankou et les lavandières de nuit. Elle continue là sa recherche d’authenticité, ce ne sont pas les penn-ti retapés qui l’intéressent, mais les vrais, les vétustes, sans velux, ceux qui laisse imaginer la dureté de la vie il y a un siècle, ceux de l’époque Déguignet.

Au détour d’un sentier bourbeux de Botmeur, Linda nous confie : « Aujourd’hui, je suis ici dans un monde de paysans, demain je dînerai à Paris avec un académicien et après-demain je serai dans mon appartement new-yorkais. » Trois jours, trois mondes, trois cultures, ce qui n’aurait pas déplu à notre globe-trotter bas-breton. Ainsi va la vie pour notre visiteuse d’automne, ravie de son passage en Bretagne.

Memoirs of a Breton Peasant sort à New York en février. Rappelons-nous les paroles prophétiques de Jean Marie Déguignet : « Mes écrits commencent déjà à produire …ils pourront produire encore plus tard, dans cinquante ans, cent ans, mille ans et plus… » Belle revanche posthume de notre Jean-Marie !

Les internautes peuvent consulter le site sevenstories.com à la rubrique biography. Un certain nombre d’exemplaires seront disponibles au local d’Arkae, ceux qui voudraient s’en procurer peuvent se faire connaître.

Bernez Rouz

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DEGUIGNET 25 ANS APRES : L'extraordinaire aventure des Mémoires d'un paysan bas-breton continue

Il y a 25 ans commençait l'aventure de la publication des Mémoires de Jean-Marie Déguignet. La première édition tirée à 2500 exemplaires parut au mois de mai 1998 aux éditions An Here du Relecq-Kerhuon. 
Parmi les moments forts du phénomène Déguignet, l'édition américaine. La traductrice Linda Asher est une référence à New-York, elle est la traductrice de Milan Kundera, le grand écrivain Tchèque qui vient de nous quitter cet été. Nous venons de dénicher sur un site américain une interview de cette grande dame qui s'exprime sur l'art de la traduction. C'est en anglais. Mais le site a repris l'interview en français de Linda Asher publié sur le site d' Arkae. On vous propose un petit retour en arrière :

L'interview écrite en anglais de Linda Asher
L'interview video en français sous titré en anglais de Linda Asher

Le livre en version anglaise est disponible auprès d'Arkae

 

 

 

 


Jean-Marie Déguignet : les citations dans la presse

Légende
Ø = rien dans l’article
¤¤¤ = l’article contient d’autre citations potentielles
*n : nombre d’article à la même date dans la même revue
 
• ADSA, juillet-août 1999. Martial Ménard, l’éditeur : « Les Mémoires… sont loin d’être un ratage, c’est une réussite fantastique, mais c’est tout le bien que je souhaite à tous les éditeurs dignes de ce nom. »
 
Al Lanv, juin 1998 : « Il donne un éclairage particulier sur le XIXe siècle en Bretagne… »
 
Ar Men, août 1998 : « Jean-Marie Deguginet : Diogène en Cornouaille (…) Ce récit est une auberge espagnole où se mêlent scènes champêtres, amours paysannes à tonalité rousseauiste, légendes, superstition, citations de Dante, Molière ou Alfred de Musset, traité d’apiculture, imprécations anticléricales et messages révolutionnaires… »
Septembre 1999, à propos des Mémoires… : « Ce trésor familial qui raconte la vie d’un klaslerien bara "mendiant", est un somptueux morceau de littérature brute et sauvage, entre chronique rurale et épopée guerrière, aux antipodes de la vision bêtifiante de la Bretagne rurale. ».
Sur Contes et légendes… : « Tout le sel de ces histoires se trouve dans la manière dont les légendes et la vie du conteur s’y trouvent mêlées… » ; 
et pour Rimes et révoltes : « Les coups de gueule rimés du gueux anarchiste et mécréant de la rue de l’Hospice à Quimper… »
 
Armor magazine, juin 1998 : « C’est un témoignage exceptionnel, parfois outrancier, sur la société bretonne au XIXe siècle, qui remet en cause beaucoup d’idées reçues. »
Novembre 1998 : « Il a consacré quelques milliers de pages de cahier à raconter sa vie, à énoncer des opinions très tranchées sur les sujets les plus divers, à disserter sur les contes, sur les abeilles ou sur les mythes, faisant fi des savants et des traités de toutes sortes y compris ce qu’il a baptisé koc’hkiologie, l’étude de la merde de chien. (…) C’est aussi une fameuse plume et ses souvenirs se dévorent comme un roman. » 
Décembre 1999 : « La Déguignet mania »
 
Bretagne économique, novembre 1999 : Ø ?
 
Bretagne magazine, n° 2, août 1998 : « Des clichés éventrés par un verbe effilé, la bonne société des gens de lettres malmenée, la "curaille" dévorée à tour de pages. (…) Breton de peu, il multiplia avant l’heure les petits boulots (…). Un document drôlement alerte, passionnant comme un roman et d’une grande justesse. »
 
Bretagne-Ile-de-France, juin 1999 : « Il est le paroxysme de l’autodidacte. (…) Sa culture, il la met au service de la réflexion. Son expérience de 14 ans d’armée en fait un pacifiste ; son voyage à Jérusalem et le spectacle de la mercantilisation du lieu par le clergé en font un anticlérical ; l’observation des mœurs des nobles en fait un républicain. » ¤¤¤
 
Bulletin du Centre d’histoire du travail, février 1999 : « (…) Il nous fait découvrir de l’intérieur la société bretonne du siècle dernier, du point de vue d’un militant républicain, suffisamment libéré des tabous d’une société cléricale pour dire les choses comme elles sont, en tout cas comme il les voit. Et son itinéraire nous fait parcourir un bon bout de chemin. »
 
Centre d’étude et de recherche sur le bonapartisme, janvier 1999 : « Ce jeune Breton, né en 1834, nous fait connaître à travers ses récits la société traditionnelle bretonne au milieu du XIXe siècle, à travers ses traditions rurales, l’importance du clergé catholique, et ses légendes biens vivaces. »
A propos du siège de Sébastopole : « Sa description du siège est édifiante ».
 
Charlie Hebdo, 23 décembre 1998, par Michel Polac : « Le folklore régionaliste m’a toujours barbé, mais les Mémoires d’un paysan bas-breton transcendent tous les genres, même la littérature… Je ne sais si J.-M. D. est un "écrivain", mais ce sacré bonhomme est un grand caractère ; un têtu, un indépendant, un libertaire, un républicain, un bouffeur de curés et de seigneurs ; il n’est pas la "voix des humbles", mais le porte-parole — plutôt le porte-mot, puisqu’il a appris seul et en cachette à lire et à écrire et à parler français — d’un peuple breton illettré parlant "patois" ».
19/01/2000 : Ø.
 
Combat breton, janvier 99, sur les Contes et légendes de Basse-Cornouaille : « Détenteur du savoir des conteurs bas-bretons, il donne un aperçu des vrais contes et légendes, tels qu’il les a appris dans la région de Quimper, au environs de 1840. »
 
Figaro magazine18 septembre 1999 : « Personnage hors du commun, aussi bruyant mort que vivant ! (…) Comme on collectionne les cartes postales, il apprend le français, l’italien, l’espagnol, cite Molière et Dante dans le texte. » ¤¤¤
 
France Inter, Synergie, 10 décembre 1998, par Michel Polac, invité : « C’est très courageux de la part des Bas-Bretons d’aujourd’hui, du côté de Quimper, de publier un livre qui fait un portrait de la Bretagne terrifiant » ; 
23 mars 99, par Bernez Rouz, invité : « En fait, il est devenu citoyen du monde. (…) Un homme décalé. Décalé de son temps, ce qui est terrible d’ailleurs à l’époque. (…) Il nous enrichit en nous donnant le témoignage de sa vie » ; « il y a des journalistes qui ont pris le temps de le lire et qui ont donné leur cri du cœur pour ce livre. Et à partir de là, ça a démarré en flèche, effectivement, parce qu’à ce moment-là, c’est le cœur des journalistes qui parlait… »
 
Généalogie magazine, mai 99 : « Son auteur, Jean-Marie Déguignet, restera sans doute une référence pour toute étude de la société rurale bretonne au cours du XIXe siècle. »
 
Impact médecin Hebdo, 10 juin 1999 : « D’après lui, c’est grâce à cela [un trou dans la tête] que son intelligence s’est mise à se développer tout à coup. Comme quoi, lui non plus n’était pas à l’abri des croyances fantaisistes… »
 
Journal du dimanche, 13 décembre 1998 : « Le Cheval d’orgueil a trouvé à qui parler. (…) Sur 2584 pages d’une jolie écriture, il vide son cœur. (…) Une telle pièce rare mérite bien un sacrifice de plus. (…) Pendant toutes ces années, il a donc écrit, dans un français limpide, sans rature. Il a parsemé ses souvenirs de contes recueillis dans la campagne bretonne et de poèmes de son cru. "Aujourd’hui, des passionnés de l’histoire du Second empire nous sollicitent pour que nous sortions en un livre à part les chapitres consacrés aux campagnes militaires de Déguignet. Ses observations sur cette période constituent un témoignage exceptionnel par quelqu’un de l’intérieur" »
27/12/98 : « Un grand écrivain doublé d’un pamphlétaire incisif, Jean-Marie Déguignet. (…) Ce parcours étonnant que Déguignet raconte avec force détails et observations sur le quotidien breton. »
 
L’avenir agricole, 29 mai 1999 : « Sa vision critique de l’âge d’or de la société rurale bretonne remet en cause beaucoup d’idées reçues. »
 
La faute à Rousseau, juin 1999 : « A Quimper, il y a une centaine d’années, dans le misérable trou qui lui sert de logis, un vieil homme entreprend le récit de sa vie. (…) Les Mémoires de Déguginet sont hauts en couleur et le verbe est souvent vert. » ¤¤¤
 
La Lettre interne, décembre 1998 : « Ce révolté de la société traditionnelle bretonne a le sens de la formule caustique et du raccourci qui laisse deviner le conteur qu’il dut être ».
 
Le Nouvel Ouest, novembre 1999 : « (…) Ce petit homme nous a légué, avec ses Mémoires, un témoignage capital sur la vie rurale du XIXe siècle. Etonnant par son importance (près de deux mille cinq cents pages couvrant pas moins de vingt-six cahiers), par l’origine de son auteur (pauvre parmi les pauvres et autodidacte clandestin), par le ton délibérément libertaire et anarchiste, par un érudition digne des grands intellectuels, avec nombre de citations latines et d’expressions italiennes ou espagnoles. »
 
Le pays breton, 1998 : « La dure vie des petits paysans de Basse-Bretagne au XIXe siècle racontée par Jean-Marie Deguignet. (…) L’image que nous donne Jean-Marie Déguignet de la vie à cette époque en Basse Bretagne est loin du triomphalisme des costumes merveilleusement brodés dans le soleil d’été ! »
 
Le Poher Hebdo, 22 octobre 1998 : « (…) Intégralement les commentaires pertinents et impertinents de Jean-Marie Déguignet, dans lesquels on retrouve l’esprit vivace et critique qui a tant plu aux acteurs de l'édition des Mémoires d’un paysan bas-breton »
 
Le Progrès de Cornouaille, 23 mai 1998 : « Le journal d’un écorché vif, autodidacte, qui dresse un portrait des plus critiques de la société du XIXe siècle, dépoussiérant au passage l’image de ce que d’aucuns appellent "l’âge d’or de la société rurale bretonne" (…) Ce qu’il raconte, il l’a vécu avec ses tripes : le carcan familial, politique, religieux…».
 
Le Trégor, 22 octobre 1998 : « Une vie hors du commun. (…) Le témoignage d’un paysan de modeste condition du siècle dernier est déjà, en soi, chose rare et forcément riche en enseignements. Mais ces Mémoires sont bien plus que cela. Pauvre et analphabète, Jean-Marie Déguignet est un autodidacte forcené, curieux de tout… Loin de l’histoire officielle des riches et des puissants, voici celle d’un homme de basse condition qui, par sa seul force de caractère, préserve la mémoire d’un peuple. »
 
Les Mains libres, mai 1999 : « Quand Per Jakez Helias traduisait en français son 19e livre écrit en breton et corrigé par sa maman, il eut disait-on beaucoup de travail, malgré sa haute formation littéraire classique, à trouver les qualificatifs multiples nécessaires à ne pas trahir l’idée ou le sentiment exprimé en breton dans Le Cheval d’orgueil. C’est le cas, en ce moment, pour les Mémoires de Jean-Marie Deguignet, qui rencontrent un succès de librairie déconcertant, mais signe d’un temps nouveau. Positif. »
 
Livres hebdo, 2 avril 1999 : juste mentionné. Ø ; 
01/10/99 : « Il est de ces textes qui resurgissent telle une irruption volcanique sur les étals des librairies. Aussi soudaine qu’impressionnante, la publication en mai 1998 des Mémoires d‘un paysan bas breton, de Jean-Marie Déguignet… »
 
Marianne, 28 juin-4 juillet 1999 : « La vie d’un paysan du XIXe : ré-vo-lu-tion-naire ! »
 
Noir et Blanc : mars 1999 : « C’est n’est plus un vulgaire témoignage que ce lecteur admiratif a entre les main, c’est le roman du siècle (du nôtre !), un roman plein de surprises et de suspense, et de personnages extraordinaires… »
 
Ouest-France, 27 septembre 1984 : [selon la Société archéologique du Finistère, les légendes rapportées par Déguignet sont comme ] « un bouquet de fleurs ancestrales tirées de l’âme populaire de Cornouaille »; 
09/10/1984 : Ø ;
mai 1998 : Ø;
16/05/1998 : Ø;
25/05/1998 : « Ces Mémoires constituent une vision décapante de la Bretagne de l’époque, mais aussi de l’armée impériale à travers ses campagnes » ;
01/07/1998 : « J.-M. Déguignet décrit les guerres de Crimée, d’Italie, de Kabylie et du Mexique avec l’œil du soldat, et non pas comme ce fut l’habitude avec celui complaisant des généraux » ;
03/07/1998 : « Né et mort dans une misère noire, il va mener entre ces deux dates une vie peu habituelle. (…) Ce destin extraordinaire d’un paysan du XIXe siècle se lit avec d’autant plus d’intérêt qu’il se déroule dans une atmosphère très révélatrice des mœurs de l’époque, avec ses superstitions, ses personnages si caractéristiques qui arrachent des sourires au lecteur »;
30/11/1998(*2) : 1er : « Un frère aîné du Cheval d’orgueil ; 2e : Ø ;
03/12/1998, sur Déguignet : « D’autant qu’il se distinguait également de la masse de ses concitoyens en se revendiquant républicain, libertaire et violemment anticlérical ». Sur les Légendes : « Rétablir la tradition vraie et pas ces légendes transformées par des messieurs de la ville en nœuds papillons » ;
21/12/1998 : reprend Bernez : « Déguignet est le seul à nous raconter cette société de l’intérieur. C’est par exemple un des rares à parler de sexualité, même si cela reste sobre. De même, c’est le seul témoignage que nous ayons de la vie des mendiants : un milieu très dur avec ses codes et ses règles spécifiques (…) L’auteur n’est pas tendre non plus avec les Français et il compare souvent la situation des Bretons avec celle des autres peuples opprimés qu’il a visités » ;
22/12/1998 : Ø ;
02/03/1999 : «  (…) Ce texte qui raconte la vie peu banale d’un paysan breton, devenu au fil de ses pérégrinations, anticlérical et républicain. Des choix qui feront de lui un réprouvé. A l’origine de cette aventure, le désir d’un jeune fils de journalier agricole d’apprendre le français » ¤¤¤ ; 
19 avril 1999 : Ø ;
27 avril 1999 : sur les Rimes et révoltes : « Le souffle de sa révolte contre les injustices, filles naturelles de la "bourgeoisie" est puissant » ;
05/05/1999 : Ø ;
06/07/1999(*3) : 1er : Ø ; 2e : Ø ; 3e : Ø ;
28/09/1999 : Ø ; 
30/09/1999 : « (…) Un homme attachant en diable, caractère de cochon et grand cœur » ¤¤¤ ; 
19/11/1999 : Ø ; 
25/01/2000 : Ø.
 
Pèlerin Magazine, 8 octobre 1999 : « Pour une fois, un homme du peuple s’exprime directement, avec ses mots à lui, décapants, corrosifs, sur une société pas si idéale que ça. »
 
Pobl Vreizh, juillet-août 1998 : « Car Deguignet fait œuvre d’ethnologue en racontant son enfance et son adolescence (1834-1854) dans la Bretagne rurale profonde du milieu du siècle passé. L’existence pour beaucoup n’avait rien d’idyllique… et les Bretons n’étaient pas aussi prudes qu’on le pense généralement. (…) En vérité, un roman d’aventure et un document ethnographique exceptionnel. »
 
Presse Océan, 17 novembre 1998 : « Lucide et iconoclaste. (…) Un témoignage intéressant, car il offre une vision de la Bretagne du siècle dernier très éloignée des peintures proches de l’allégorie habituellement véhiculée dans la littérature bretonne de l’époque. (…) Un vrai prophète »
 
Progrès-Courrier, 21 novembre 1998, sur les Mémoires d’un paysan bas-breton : « devenu un succès de librairie tant il sonne juste », et sur les Contes et Légendes de Basse-Cornouaille : « Les lecteurs d’aujourd’hui, jeunes et moins jeunes, retrouveront aussi les récits qui ont enchanté leurs ancêtres vers 1840… ».
 
Reporter breton, n° 14 : « Ce journal d’un écorché vif irrite parfois par ses outrances, mais le propos de l’auteur est vif, son récit extrêmement vivant, sa vie se lit comme un roman d’aventure. sa grande qualité est indéniablement la sincérité. Sa vision critique de l’âge d’or de la société rurale bretonne remet en cause beaucoup d’idées reçues. »
 
Le Télégramme
17/05/1998 : [de Bernez] : « C’est l’histoire d’une vie écrite à la main, un patrimoine qui, vu son intérêt, ne pouvait rester dans l’ombre. (…) Car le témoignage reste d’une force inégalée » ;
18/05/1989 : « Les Mémoires sulfureuses de Jean-Marie Déguignet » ;
14/07/1998 : « (…) Le récit de sa vie, "une longue vie de misère, d’esclavage, de persécution"… » ;
30/08/1998 : Ø ;
04/12/1998 : sur les Contes et légendes… : « A la fois cocasses et différentes, ces histoires sont peuplées d’êtres imaginaires, si familiers des Bretons de l’époque : Ankou, le diable, mendiante, revenant malicieux, etc. Elles n’échappent pas à la critique de Déguinet… » ;
23/12/1998 : sur les Contes et légendes… : « Les nombreux lectures qui ont aimé les Mémoires d’un paysan bas-breton ne seront pas déçus par ce recueil d’histoires. Ils y retrouveront le ton direct et la franchise de Déguignet. Ici, il brocarde les courtisans et les parasites, se moque des prêtres, qu’il ne porte pas dans son cœur, de la crédulité des paysans, ainsi que du diable qui, dans ces contes, se fait souvent rouler… » ; 
22/01/1999 : « Jean-Marie Déguignet fait aujourd’hui figure de petite révolution dans le milieu des historiens, mais aussi auprès du grand public. (…) Il suffit, pour comprendre le phénomène de se plonger dans les 450 pages que comprend l’ouvrage. Et quelques phrases prises au hasard, la magie de l’épopée surgit et le "pavé" devient livre de chevet » ¤¤¤ Avril 1999 : Ø ; 
29/04/1999 : « Les Rimes et révoltes du croquant Déguignet. (…) Jean-Marie Déguignet, gueux républicain, Breton à la verve flamboyante… » ¤¤¤ ;
27/09/1999 : « Une vie vraiment pas ordinaire. Se plonger dans les 450 pages de l’édition établie par Bernez Rouz, c’est aller à la rencontre d’un homme hors du commun, d’un révolté absolu, intransigeant, d’une érudition impressionnante à force de lectures et de campagnes militaires où il ne cesse d’enrichir ses connaissances ».