Croas Spern : un siècle de loisirs

Un nom

On ne sait pas pourquoi Croas Spern, qui signifie « Croix des épines », s’appelle Croas Spern. Il n’existe aucun nom de ce type en Bretagne. À cet endroit, dans le cadastre de 1834, se trouve une parcelle nommée Parc ar Spern, champ d’aubépines.

Un carrefour, une maison

Le calvaire, qui indique la date de 1565, n’était pas au même endroit qu’aujourd’hui. Associé à une fontaine, il se dressait en contrebas du centre de l’Athéna, au carrefour de la route venant du bourg et de l’ancienne voie romaine bordée de châtaigniers, rejoignant Lenhesq-Quimper (le tracé de cette route a changé). En 1947, sa croix tombe ; en 1985, il est déplacé. En 1991, les morceaux de la croix sont remontés à l’initiative d’Arkae. À Croas Spern, on trouvait une maison et un jardinet clôturé par une haie d’aubépines, comme le racontait René Huguen, en 2002[1]. Ses grands-parents louaient cette habitation à des propriétaires de Saint-Joachim. La maison fut détruite en 1996. À l’époque, elle n’avait toujours pas d’électricité ni d’eau courante, tandis qu’au-dessus d’elle grésillaient déjà les lignes haute tension.

Des terrains de sport

Dès leurs débuts, les clubs historiques ont vu dans ce lieu un avantage : c’est le centre géographique d’une commune à l’habitat dispersé. C’est ainsi qu’en 1921, les gymnastes des Paotred s’installent à L’Hôtel dans un baraquement acheté par René Bolloré. Mais les Paotred repartent vers 1928 à Keranna. Puis en 1938, c’est l’éphémère Football club d’Ergué-Gabéric (ancêtre de l’AEG) qui foule le sol de Croas Spern : le club joue sur un terrain qui s’étend derrière la croix, sur la voie romaine[2]. Plus tard, en 1944, l’Union sportive d’Ergué-Gabéric (autre ancêtre de l’AEG !) décide d’acquérir là un « terrain d’éducation physique et sportive », « le terrain de L’Hôtel ». Ces terres appartiennent à M. Grandbois de Villeneuve, qui sera resollicité quand le complexe s’étendra. En 1952 et en 1976, des vestiaires et tribunes sont construits. Les réunions du comité de l’AEG se tiennent au café Rannou à L'Hôtel. 

Une baraque : le Foyer des jeunes

En 1967, un groupe de jeunes (à partir de 15 ans), qui se réunissaient depuis 1965 à l’ancienne école des sœurs, au bourg, pour pratiquer ses loisirs, se retrouve sans salle. Ils sont conduits par Marie-Claire Hostiou et René Riou. Pour leur nouvelle salle, ils pensent que le lieu idéal serait au milieu d’Ergué, donc à Croas Spern, car de nombreux membres se déplacent à vélo de tous les coins de la commune. L’accord du maire, Jean-Marie Puech, et un pécule leur sont donnés. Place, alors, à la débrouille : les jeunes achètent à Brest une baraque, démontée par Yves Nicot et transportée à Croas Spern sur le camion de Fañch Le Berre. Les jeunes montent la baraque sur une dalle de la municipalité, à l’emplacement actuel de la salle Ti-Kreis. À l’intérieur, ils disposent d’un baby-foot, d’un ping-pong, d’un bar sans alcool… Par ailleurs, tous les jeudis, les jeunes prennent en charge de jeunes enfants. Ce sont là les prémices à la fois, de l’Espace Jeunes et du Centre des loisirs[3]. Jusqu'en 1972, Pierre Bacon, Nicole Poupon et toute une équipe se retrouve là le week-end, organisant entre autres des bals. Ils constatent que les jeunes de Lestonan ne viennent pas beaucoup. On suppose que l’activité du foyer a cessé vers 1973[4].

Un complexe et une Maison pour tous

En 1978-79, des personnes désireuses d’impulser une dynamique culturelle dans la commune fondent la Maison pour tous, présidée par Jacqueline Le Fur. Leur but est, notamment, de « sortir des locaux », d’aller dans les quartiers et les écoles. Ainsi, si le premier bureau de l’association a pour premier projet de s’installer au bourg, décision est prise, ensuite, de développer les activités dans un lieu plus central, à Croas Spern[5]. En 1979, la municipalité installe donc un préfabriqué à la place de la baraque du Foyer des jeunes pour accueillir cette nouvelle structure.
Dès lors, la MPT se déploie en tous sens : sports, loisirs créatifs, horticulture, cours de langue, de musique, labo-photo, couture, voyages, conférences, expos, festoù-noz, ciné-club… Son atelier floral, animé par Anne-Marie Quelven, rencontre un grand succès. La MPT deviendra la pépinière de plusieurs associations qui prendront ensuite leur envol : basket, aïkido, judo, Gabiers de l’Odet, Chœur des vallées…
Côté jeunesse, la MPT accueille le mercredi une trentaine d’enfants de 3 à 12 ans[6], d’abord dans ses locaux, puis dans un préfabriqué en 1983. En 1987, avec le boom démographique, ce centre des loisirs double sa capacité d’accueil, puis quadruple en 1990 : une nouvelle baraque est installée. Enfin, à partir de 1994, la MPT reçoit les jeunes de 12-17 ans. Au cours des années 1990  est construit le bâtiment de l'ALSH (accueil de loisirs sans hébergement). En 2004, elle obtient l’agrément de la CAF en tant que centre social.
Malgré un fort développement (150 à 800 adhérents en 20 ans), la MPT est toujours abritée, à la fin des années 1990, dans des locaux provisoires. En 1997, pour accompagner ce développement et concrétiser leur partenariat, la Ville et la MPT signent une convention par laquelle la première confie à la seconde la gestion des services publics liés à la jeunesse et au socio-culturels. En 2002, la Ville construit donc un bâtiment (l’actuelle Athéna) pour héberger les activités de l’association. Les équipements et le personnel sont alors gérés par la MPT.

L’Athéna, un centre « en dur », et un complexe toujours en extension

En 2009, la convention de partenariat entre la Ville et la MPT n’est pas renouvelée. À partir de cette année-là, la gestion de l’Espace jeunes, le personnel, la location des salles et la programmation passent de la MPT à la Ville. Pour marquer ce transfert, la salle prend le nom de L’Athéna. Pendant la décennie 2010, la MPT délaissera donc ses activités financées, dont son projet social, qui refleurira sous la forme de Graines de familles. Elle conserve dans une petite salle le scrabble et l'informatique, animés par des bénévoles. En 2021, après 40 ans d’existence, elle est dissoute.
De 2009 à nos jours, la vie de L’Athéna a été marquée par différents temps forts : la Fête du jeu (depuis 2006), le feu d’artifice du 13 juillet (depuis 2013), le Tour des véhicules anciens (1600 personnes en 2013), les spectacles (Anne Roumanoff en 2016 : 1800 personnes), les grands matchs…Des terrains et des installations continuent de se construire chaque année : terrain synthétique, court de tennis, street workout, bike park, city stade... sont les derniers venus au cours des années 2010 et 2020.
Au quotidien, les expositions des locaux (peintres, photographes, associations) se succèdent dans le hall de l'Athéna. On y croise aussi les enfants du Centre des loisirs, les ados de l’Espace jeunes ; les associations fréquentant les salles du complexe ; le public... Au quotidien, les expositions des locaux se succèdent dans le hall. Au moins deux ou trois générations se sont succédées ici, au centre de la commune, pour vivre leurs loisirs ensemble.

Quelques dates

1921-1928 : les Paotred s’installent à L’Hôtel (gym et répétitions dans une baraque)
1948 : aménagement d’un terrain et d’un abri de l’USEG (ancien AEG)
1952 : 1re construction des vestiaires municipaux
1964 : 2e construction d’une tribune avec vestiaires et douches
1966 : aménagement du 2e terrain en herbe bordant le précédent
1967 : le Foyer des jeunes, construit sa baraque, actuellement salle Ti-Kreis. Leur activité semble avoir duré environ 5 ans.
1976 : 3e construction de tribunes et vestiaires pour l’AEG
1979 : construction du préfabriqué de la MPT, à la place de la baraque. Installation de la MPT dans ce bâtiment.
1982 : construction de la salle Paul-Émile Victor par P. Ruelland, rénovée en 1993 et en 2019
1983 : installation du préfabriqué du Centre des loisirs, à côté de la Maison pour tous
1989-1990 : construction d’une nouvelle baraque pour le centre des loisirs
+ déplacement et réfection du calvaire
1992 : inauguration du complexe sportif par Kofi Yamgnane : construction des salles Jacqueline-Auriol (polyvalente, avec tapis) et Éric-Tabarly (omnisports) par A. Malo et d’un terrain de foot
1994 : ouverture d’un Espace jeunes au sein de la MPT
1993 : construction du logement du gardien de Croas Spern
1996 : destruction de la maison des Le Meur
Vers 2000 : aménagement de l’entrée du complexe
2002 : construction du bâtiment MPT-centre social (actuelle Athéna)
2007 : construction de la salle Haroun-Tazieff (arts martiaux) par J.-P. Carrer
+ Les locaux de la MPT deviennent la salle Ti-Kreis
2008 : construction de la salle Suzanne-Lenglen (tennis) par H. Jacquelot et J.-P. Thomas
2009 : transfert de gestion des équipements de la MPT à la Ville : le bâtiment MPT-Centre social devient L’Athéna
2010 : construction de la piste cyclable
2012 : ouverture de la déchetterie de Quillihuec, en face
2013 : inauguration du boulodrome
2014 : création du site internet de l’Athéna
2016 : inauguration du street workout
2019 : inauguration du skate-park
2020 : lancement des animations estivales « La base de loisirs »
construction d’un terrain de foot synthétique
2022 : inauguration du bike-park et du city-stade

-> RDV le 18/10/2025 à Ti-Kreis : table ronde, expo et nouvelle publication sur les sports à Ergué-Gabéric.

Article rédigé par Marilyne Cotten. Texte synthétisé dans Au fil d'Ergué, octobre 2025.

Reconstitution cadastre 1834 pour Croas Spern

 

 

 

 

 

 

 

 


Cadastre de 1834 montrant l'ancien emplacement des voies dans les environs de Croas Spern.

 

Photo 1991 Reconstruction du calvaire de Croas Spern Raymond Lozach 1

 

 

 

 

 

 

 

 1991: Reconstruction du calvaire de Croas Spern, inauguration par le président d'Arkae, Raymond Lozach. Fonds Arkae, article de presse.

ferme Croas Spern années 1990 Don Jean Le Reste 26 03 02

 

 

 

 

 

 

Ferme de Croas-Spern dans les années 1990, avant sa destruction. Fonds Arkae, don Jean Le Reste 2002.

Laurent Le Meur et Marie Jeanne Cuzon à Croas Spern v 1930

 

 

 

 

 

 

Laurent Le Meur et Marie Jeanne Cuzon à Croas Spern vers 1930. Fonds Arkae, don René Huguen, 2012.

AEG En 1946 avant projet de terrain Web Don Patrick Poupon 2025

 

 

 

 

 

En 1946, avant-projet de terrain de l'USEG. Fonds Arkae, don Patrick Poupon, 2025.

AEG fin des années 1940 match des célibataires contre les mariés à Croas Spern fonds Jean Le Berre du bourg 2000

 

 

 

 

 

 

AEG, fin des années 1940, match des célibataires contre les mariés à Croas Spern. Fonds Arkae, don Jean Le Berre (bourg), 2000.

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Reconstruction de la baraque Foyer des jeunes d'Ergué-Gabéric à Croas Spern, en 1969. Photo presse. Fonds Arkae, don Danielle Riou, 2025.

Foyer des jeunes inauguration en 1967 Don Mme Ach 28 02 03 c

 

 

 

 

 

Inauguration du Foyer des jeunes en 1969. Fonds Arkae, don René Riou et Marie-Claire Ac'h, 2002.

La MPT années 1980

 

 

 

 

 Les préfabriqués de la MPT et du Centre des loisirs dans les années 1980. Fonds Arkae.

 

Activités de la MPT an 80 et 90 Web

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les 10 ans de la MPT (haut), l'activité couture (milieu), l'activité karaté. Entre 1980 et 1990. Fonds Arkae, don Jacqueline Le Fur, 2002.

 

Inauguration salles eric tabarly et jacqueline auriol par Kofi Yamgnane 1992

 

 

 

 

 L'inauguration des salles Tabarly et Auriol par Kofi Yamgnane en 1992. Fonds Arkae, don MPT.

 

Construction de lAthéna début années 2000

 

 

 

 

 

La construction du centre culturel à Croas Spern en 2002. Fonds Arkae.

 

Passage MPT Athéna 2009

Le transfert de gestion de la MPT à la municipalité en 2009. Bulletin municipal d'Ergué-Gabéric.

 

[1]René Huguen, « Croas Spern », Keleier n°19, Arkae, avril 2002.

[2] S’y joue un match mémorable les opposant à Bénodet, dont l’équipe était renforcée de réfugiés républicains espagnols, fabuleux joueurs dont se souviendra Jean Thomas. Voir Amicale Ergué-Gabéric, 1945-1995 (brochure) et Jean Thomas, Gosse de village, 2000 (mémoire).

[3] Entretien de Marilyne Cotten avec Marie-Claire Hostiou, épouse Ac’h, en 2023 ; avec Nicole, Patrick Poupon et Danielle Riou, en 2025 ; articles de presse, délibérations et bulletins municipaux conservés à Arkae.

[4] Sa dernière trace écrite est dans les délibérations du conseil municipal : une subvention attribuée en 1972.

[5] Entretien de Gaëlle Martin avec Jacqueline Le Fur le 30 août 2002.

[6] À la demande de la CAF, un centre aéré a été ouvert à l’école du Rouillen en 1978. Après l’ouverture de la MPT, il a été déplacé à Croas Spern. L’employée de la MPT, Marie-Christine Huet, partageait son travail entre la MPT et le centre aéré.

 

Remerciements

À Patrick Dalibot, qui a eu l'idée en 2022, de lancer des recherches sur ce thème. À lui encore, à Annie Le Rest et Marie-Thérèse Kerbourch, pour le tri et le dépouillement des bulletins municipaux sur ce sujet. À François Ac'h, qui a récolté des informations sur l'ancienne voie romaine et la route de Coray, mais n'a pu terminer ce projet. À son épouse, Marie-Claire Hostiou, pour les archives sur le Foyer des jeunes, ainsi qu'à Patrick Poupon (merci aussi pour l'AEG), sa soeur Nicole ; René et Danielle Riou. À Jacqueline Le Fur et Marie-Louise Rosmorduc, pour avoir répondu aux questions de Gaëlle Martin sur la MPT. À Laurie Sévère, pour l'accès aux délibérations du conseil municipal dans les années 1970. À Pierre Faucher, pour avoir défriché ce sujet. À Bernez Rouz pour les recherches complémentaires en presse ancienne.

 


Recteurs d'Ergué-Gabéric au XXe siècle

Cet inventaire des recteurs d'Ergué-Gabéric a été retrouvé dans les archives de l'une des membres d'Arkae, Marie-Annick Lemoine, après son décès en 2020. Marie-Annick avait publié au sein de l'association une étude approfondie sur la translation du cimetière d'Ergué-Gabéric. On trouvera ci-dessous une petite galerie de portraits qui permettra à ceux qui s'intéressent à l'histoire d'Ergué-Gabéric de resituer certains de ses acteurs.

 

1897-1908 · Jean HASCOET 
Né le 26/06/1850 au Juch, ordonné prêtre en 1874, vicaire à Rosporden, Ergué-Armel, Bénodet, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1897 : il fit de nombreux embellissements à la chapelle de Notre-Dame de Kerdévot et surtout il dota la paroisse d’une école chrétienne de filles, dont il était justement fier et qui persista, malgré le renvoi des Filles du Saint-Esprit à qui il en avait confié la direction. Malade depuis de longs mois, il mourut à Ergué-Gabéric le 15/01/1908 dans sa 58e année.

1908-1909 · Alain le BIHAN
Né le 03/11/1854 à Plougoulm, ordonné prêtre en 1878, vicaire à Saint-Martin-de-Morlaix, à Plouider, puis recteur à Pleuven, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1908 : « Tonton Lann passa 11 ans à Pleuven et fut mis à l’épreuve à Ergué-Gabéric. Il méritait ce poste et le Grand-Ergué méritait un tel pasteur. Mais ils ne se convenaient pas l’un à l’autre. Il y a des impondérables du ministère qui frappent d’une vraie inhibition des hommes qui pourront donner leur pleine mesure ailleurs. Il accepta de devenir recteur de Lampaul-Guimiliau en 1909 ; il y resta 31 ans » dit La Semaine religieuse à son propos. Il était chapelain de la Miséricorde de Landerneau ; il y fêta ses 93 ans le 23/11/1947 et mourut le 29 du même mois.

1909-1913 · Jean-Marie LEIN 
Né le 22/08/1859 à Saint-Pol-de-Léon, ordonné prêtre en 1883, vicaire à Botsorel, Saint-Thégonnec, Chapelain à Plouigneau, aumônier de l’hôpital de Morlaix, recteur à Landeleau, à Plonéour Ménez, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1909 jusqu’en 1913, puis fut recteur à Plougourvest et aumônier de la Salette à Morlaix. Il décéda le 15/10/1936.

1914-1938 · Louis PENNEC 
Né le 23/12/1860 à Port-Launay dans une famille de 17 enfants, ordonné prêtre en 1885, vicaire à Lennon, à Kerfeunteun, recteur à Irvillac, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1914 et c’est là qu’en 1935, à l’occasion de ses noces d’or sacerdotales, Monseigneur l’Evêque « voulut récompenser sa prudence, sa piété, sa charité, sa douceur et son zèle sacerdotal, en lui conférant la mosette de Doyen honoraire ». Il continua trois ans son ministère à Ergué-Gabéric, se retira à l’Ile-Tudy et décéda à l’Hôtel-Dieu de Pont l’Abbé le 06/05/1943.

1938-1941 · Pierre NEILDE 
Cahier de délibérations du conseil de la fabrique EG_Décès Pierre Neildé_1941Né le 29/11/1884 au Juch, ordonné prêtre en 1910, vicaire à Pont-Croix, Saint-Louis de Brest, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1938 ; il fut décoré à la guerre 1914-1918. Musicien formé par le chanoine Mayet, jouant bien de l’harmonium et de l’orgue, il fut maître de chapelle à Pont-Croix puis dirigea la maîtrise à Saint-Louis de Brest, il fut « un prêtre exemplaire ; c’est vrai et c’est un bel éloge. Prêtre exemplaire, M. Neildé le fut à Ergué-Gabéric où il n’aura passé que deux ans et quelques mois comme recteur. Toujours à son devoir, c’est en se pressant de rentrer d’une visite à son frère malade pour faire son catéchisme qu’il a été terrassé d’une hémorragie cérébrale, le lundi vers midi » note La Semaine religieuse. Il expirait le mardi matin, 07/01/1941 vers 5 heures à Ergué-Gabéric où sa messe de funérailles fut célébrée le 09/01/1941 par le recteur d’Ergué-Armel. Ci-contre, le décès de Pierre NEILDE relaté par Gustave Guéguen dans un extrait du Cahier de délibérations du Conseil de la fabrique d'Ergué-Gabéric le 07/01/1941.

1941-1956 · Gustave GUEGUEN 
Né le 13/03/1889 à Corlay (22), famille originaire de Locronan, ordonné prêtre en 1913, vicaire à Tourc’h, à Argol, à Audierne, à Plabennec, aumônier de l’hôpital civil de Brest, recteur à Clohars-Fouesnant, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1941. « Il est sûr que c’est presque une tautologie et un pléonasme de dire que M. Guéguen (j’allais écrire « Gustave » comme tout le monde) fut l’une des figures sacerdotales les plus originales du diocèse. Car il était l’originalité "incarnée" », dit un de ses condisciples dans La Semaine religieuse. Recteur d’Ergué-Gabéric pendant 15 ans, après Clohars-Fouesnant, on y avait mesuré à son aune ce « prêtre remarquable par la finesse de son esprit, la vivacité de son intelligence, sa culture, son goût artistique, son éloquence captivante, ses dons de conteur et l’humour avec lequel il narrait ses histoires » . Il fut « le pasteur courageux, toujours en éveil pour signaler les dangers de perversion, condamner les abus, préserver les âmes du pêché et assurer leur salut ». Il est décédé le 13/06/1956 à Ergué-Gabéric ; le dimanche précédent, il avait officié comme de coutume et présidé la procession du Saint Sacrement à Odet. Le lundi, il célébrait encore la messe. Et voilà que le mercredi après-midi, après avoir reçu l’Extrême-Onction et le Saint Viatique, il s’endormait paisiblement dans le Seigneur.

1956-1969 · Pierre PENNARUN 
Né le 01/09/0904 à Briec-de-l’Odet, ordonné prêtre en 1934, vicaire à Saint-Yvi, à Kerfeunteun, recteur à Plouyé, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1956, puis recteur à Saint-Ségal, il se retire à « « Missilien » à Quimper. A Ergué-Gabéric, paroisse aux structures plutôt compliquées, il mena de front les tâches pastorales et les importantes réparations qui s’imposaient d’urgence à l’église paroissiale et au presbytère. Sur la maison de retraite « Le Missilien », à Kerfeunteun, où il a vécu 10 ans, il a écrit « [c'est] un lieu idéal pour les prêtres âgés : ils y trouvent la paix et la solitude, avec aussi les joies de la société ; ils y reçoivent les soins appropriés à leur état et ils disposent du temps désiré pour la méditation, la prière personnelle et collective. Ce sera pour moi le temps de l’action de grâce ». Il y décéda le 22/10/1989.

1969-1981 · Jean-Louis MORVAN 
Né en 1920 à Trégarantec, ordonné prêtre en 1947, vicaire à Landudec, Névez, au Pilier rouge à Brest, recteur à Melgven, il fut nommé recteur d’Ergué-Gabéric en 1969, puis à la Forêt-Fouesnant et enfin il eut une retraite active au presbytère de Pouldreuzic ; pendant la guerre 1939-1945, il fut prisonnier en Allemagne. Il eut de nombreuses activités « financières » à mener entre la dette de la chapelle de Keranna, la construction de la salle paroissiale du Rouillen, le saccage et la restauration du retable de Kerdévot, sa campagne pour la restauration et la célébration solennelle du tricentenaire des orgues Dallam de Saint-Guinal, église paroissiale d’Ergué-Gabéric. « Pour ses actions et sa ténacité dans la défense du patrimoine d’Ergué-Gabéric, notamment pour le retable de Kerdévot et les orgues Dallam, pour son immense culture et sa passion, Jean-Louis Morvan a été décoré de la Croix de Chevalier du Mérite », trouve-t-on dans sa nécrologie. Il est décédé fin août 2006 à 86 ans.

1981-1983 · Henri LUCAS 
Né le 14/02/1924 à Pont-Croix, ordonné prêtre en 1948, vicaire à Quimperlé, Crozon, au sanatorium de Thorenc, aumônier militaire près de 27 ans, vicaire à Ergué-Gabéric, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1981, puis recteur de Saint-Philibert en Trégunc. Il décéda le 21/04/1991 et fut enterré à Kerfeunteun le 23.

1983-1993 · Corentin le CORRE 
Né le 08/12/1928 à Landudec, ordonné prêtre en 1953, instituteur à Landivisiau, Moëlan, directeur d’école à Arzano, prêtre « fidei domum » au diocèse de Brazzaville, au service de Quimperlé, chargé de Baye, aumônier des gens du voyage, aumônier de la maison d’arrêt de Quimper, il fut nommé recteur à Ergué-Gabéric en 1983, puis au service du secteur de Châteaulin, recteur à Landeleau et Spézet, enfin, curé solidaire de l’ensemble paroissial de Châteauneuf-du-Faou. Il est décédé le 28/07/1999. « Corentin, dans la mission, tu n’as pas été un "travailleur indépendant", tu n’étais pas installé "à ton propre compte". Tu n’entreprenais pas seul, mais toujours en concertation avec d’autres, tu pensais, tu agissais en Eglise [...] Merci pour ton humour, signe que tu étais heureux à ta place, signe de ta lucidité ; merci de nous apprendre à rire de nous-même, de nos contradictions, des futilités qui souvent encombrent nos vies », dit l’abbé Alain Nicolas à ses obsèques à Landudec le 30/07/199.

1993-2003 · Alain ROUE 

2003 · Robert TAVENNEC 


Gustave Guéguen : le recteur, son jardinier et les deux visiteurs

L’abbé Gustave Guéguen, qui fut recteur d’Ergué-Gabéric de 1941 à 1956, et que tout le monde désignait par son prénom « Gustave », était à la fois un homme populaire, et quelqu’un de très cultivé. Il avait de nombreuses relations, dont par exemple celle de Monsieur André François-Poncet. Celui-ci avait promis à « Gustave » de venir le saluer dans son presbytère breton dès qu’il en aurait le loisir. Tout intellectuel qu’il était, « Gustave » aimait beaucoup jardiner, et pour se mettre plus à l’aise dans ses travaux de jardinage, il portait un pantalon de marin, de couleur brique, ce qui fit que certains l’appelaient « person bragou ru » (le recteur au pantalon rouge). C’était peu après la guerre, en période de vacances. Le temps était beau, un temps à jardiner. Le soleil tapait dur. Coiffé d’un chapeau de paille, notre « Gustave » s’accorda une pause et s’assit sur un banc de pierre, qui se trouvait près du portail d’entrée et servait autrefois aux prêtres pour les aider à enfourcher leur cheval quand ils allaient rendre visite à leurs ouailles. Gustave était donc là, sur ce banc de pierre quand on frappa au portail. Et il se trouva face à deux messieurs, élégants et bien mis, qui se présentèrent comme étant deux neveux d’André François-Poncet venant saluer de sa part Monsieur le Recteur. André François-Poncet a été ambassadeur de France en Allemagne de 1931 à 1938, arrêté par la Gestapo, prisonnier en Allemagne pendant 3 ans, puis à nouveau ambassadeur à Bonn jusqu’en 1955, nommé membre de l’Académie française en 1952 (au fauteuil de Philippe Pétain), président de la Croix-Rouge française, puis de la Croix-Rouge internationale, etc. « Gustave », surpris, appela la « carabassen » pour les faire entrer au salon, et d’éclipsa rapidement. Très vite, il se changea, fit un brin de toilette et enfila sa soutane. Puis, rentrant dans le salon, il leur demanda le but de leur visite. Les deux neveux, surpris à leur tour, se regardèrent, et l’un d’eux se risqua : « Mais n’est-ce pas vous qui nous avez accueillis au portail tout à l’heure ? ». Et « Gustave » de répondre : « Non, non… c’est mon frère jumeau, que j’héberge, et qui entretient le presbytère ». « Gustave » était tout confus et vexé de s’être ainsi présenté en jardinier devant… les ambassadeurs de l’ambassadeur.

Texte eecueilli dans les années 1960 par Jean Guéguen auprès de l’Abbé Pennarun, qui succéda à « Gustave » comme recteur.


Les lessiveuses d'autrefois

Avant nos machines à laver le linge modernes, avant toute mécanisation du lavage, il y avait un matériel particulier, correspondant à l’opération du lessivage, qui semble avoir longtemps servi, et dont il subsiste à Ergué-Gabéric quelques reliques souvent ignorées. Beaucoup d’entre nous connaissent la « lessiveuse », qui est un récipient en métal, de forme tronconique, avec un double-fond d’où monte à la verticale un tube. Cette cheminée centrale se termine par un champignon qui fait office d’arrosoir. La « lessiveuse » chargée de linge était installée au-dessus d’un foyer, posée sur un trépied. La vapeur obtenue par chauffage de l’eau au fond de la lessiveuse montait par la cheminée intérieure et diffusait la solution alcaline du produit justement appelé « lessive ». L’eau bouillante, eau de lessive, redescendait en traversant le linge et retombait au fond pour remonter à nouveau.

 

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↑ Trois modèles de socle en pierre (Dr Keravec).

 

Mais avant la « lessiveuse », qu’est-ce qu’il y avait ? Il y avait « ar bailh », du probable nom en breton d’une « lessiveuse » primitive, où l’arrosage du linge se faisait non pas automatiquement, par le mouvement ascensionnel et canalisé de la vapeur d’eau, mais manuellement. De ces installations primitives, il nous reste des vestiges, en particulier les quelques exemplaires de socle en pierre conservés ici ou là. En voici une description par le Dr Keravec, dans la revue Le Lien du Centre de généalogie du Finistère, année 1955 : « II s'agit d'une pierre en forme de disque de plus d'un mètre de diamètre, et épaisse de 20 à 30 centimètres. A une dizaine de centimètres de son bord externe court une cannelure ou rigole assez profonde ; d'autres rigoles peuvent rayonner, divisant la dalle en quatre secteurs ou plus. Tout ce réseau se termine par un bec d'évacuation plus ou moins travaillé. Parfois, toute la partie interne à la cannelure circulaire est légèrement creusée Cette dalle n'est en fait que la partie massive et non périssable de la "machine". Elle constitue le fond pour la récupération des eaux de lessivage. [...] Dans la gorge circulaire venait s'adapter une "baille à buée", tirée d'une barrique défoncée, dont seules subsistaient les douves et les cercles. Sur la dalle, la baille était bien en place. Dans le foyer voisin brûlait un bon feu, sur lequel on faisait chauffer de l'eau. Un "drap à lessiver" garnissait entièrement le baillot dans lequel on disposait en couches successives les différents éléments à laver. Après une première couche de linges, draps, chemises, etc. on saupoudrait de "ludu tan" (cendres de bois gorgée de potasse), que l'on arrosait d'eau chaude. Puis on disposait une autre couche de linges. Et ainsi de suite jusqu'à la limite permise par la baille. II restait à rabattre sur le tout les bords du "drap à lessiver", et à tasser au moyen d'une lourde pierre. [...] L'eau chaude versée sur le dessus était récupérée par le bec verseur de la dalle dans une auge ou un récipient, elle faisait plusieurs passages successifs dans le baillot. Peu à peu, l'eau et la cendre faisaient leur travail. L'eau sale était conservée : riche en potasse, elle constituait un engrais appelé "ar cloag", recherché des maraîchers. Après rinçage, on procédait au blanchiment des linges et draps, bien étalés au soleil sur l'herbe du placître ».

A Ergué-Gabéric, nous connaissons plusieurs socles de ce type d’installation pour lessives à la cendre. Ainsi, à Squividan, à Bohars, à Kergoant, on trouve ces dalles, mises au rebut, en dehors de la maison. Le vestige le plus significatif est sans doute celui de Pennarun : encore située dans une arrière-cuisine, près d’un foyer, la dalle est comme encastrée dans le mur, sous une fenêtre. Mais, curieusement, le bec de récupération des eaux verse à l’extérieur de la maison.

 

Socle de la baille à lessiver de Squividan

↑ Socle de la « baille à lessiver » de Squividan

Ar bailh lessiveuse de Bohars

↑ « Ar bailh » de Bohars. Pierre creusée qui supportait le fût. On distingue bien la cannelure où s’encastrait le fût, ainsi que le bec d’ évacuation.

Pierre à laver du manoir de Pennarun

↑ Pierre à laver de Pennarun, dessinée par Jean Istin en 2008

Henri CHAUVEUR et François AC’H