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Poème de Bernard Le Bihan

Bernard Le Bihan, membre d’Arkae, s’est déjà illustré dans les lignes du Keleier avec un récit intitulé La boîte en Fer blanc et le portrait du cantonnier du bourg. Il nous propose aujourd’hui de reprendre le chemin des écoliers avec ces quelques vers. Malgré les langueurs perceptibles de l’automne, semble monter de la nature comme un discret appel à l’école buissonnière...

 

Automne

 

L’aube s’est levée dans des écharpes de brume

Annonçant un jour sale par ses nuages gris

Et l’on entend le cri d’un rapace nocturne

Qui, la chasse terminée, regagne son abri.

 

Tenant d’une main un cartable trop lourd

Qui lui bat le mollet, qui s’accroche en chemin

A travers landiers, champs et labours

Le petit homme se hâte vers le village voisin.

 

Sur un tapis de mousse et de bruyère mêlées

Deux pigeons se régalent de glands

Aux pieds d’un grand chêne aux longs bras décharnés

Dont le tronc noueux a défié bien des ans.

 

Sous la caresse du vent le peuplier gémit

La feuille se détache et tombe lentement

Dans le ruisseau grossi par les dernières pluies.

Le roseau, penché, hoche la tête tristement.

 

C’est l’automne.

 

Bernard Le Bihan, 1964

 

 

Keleier 21 - septembre 2002

 


Trésors d'archives > Souvenirs > J'ai été sonneuse de glas à Kerdévot

« J'ai été sonneuse de glas à Kerdévot »

Par Marie SALAÜN

De ses souvenirs de jeunesse, alors qu'elle habitait tout près de la chapelle, à Menez Kerdevot, Marie a réussi, même si elle se désole de certains oublis ou inexactitudes, à nous transmettre ce témoignage d'une époque où le culte des morts revêtait beaucoup d'importance.

"Quand je devais sonner le glas, il fallait monter sur la tour. Je passais par l'escalier de dehors. Il y avait une rampe d'un côté, mais pas de l'autre. Puis je me hissais, et je sonnais le glas avec les battants. Il y avait deux cloches à Kerdévot.

Je sais qu'il y avait un rythme différent pour annoncer le décès d'un homme, celui d'une femme, celui d'un enfant, mais je ne me rappelle pas trop bien du code, c'est-à-dire du nombre de tintements. J'ai sonné une seule fois pour le décès d'une fillette, heureusement ! Quand j'étais absente, une autre personne le faisait, mais il paraît que ma façon de sonner était reconnaissable.

Le glas était sonné plutôt en fin de journée.

J'avais peur des chauves-souris, mais il fallait y aller quand même.

Il était sonné pour annoncer le décès de quelqu'un du quartier, et aussi parfois pour les voisins proches d'Elliant.

C'est la famille du défunt qui disait où il fallait sonner le glas, et qui payait pour cela. A Ergué-Gabéric, le glas pouvait être sonné au Bourg, à Kerdévot, à Saint-André et à Saint-Guénolé. Le glas était sonné à l'un de ces clochers avant l'enterrement, mais celui-ci se faisait toujours à l'église paroissiale.

Voilà quelques moments de ma vie qui se sont passés auprès de la chapelle de Kerdévot, dans les années 1943 – 1945, et peut-être un peu plus".

 

Témoignage recueilli par Suzanne Lozac'h et Jacqueline Le Bihan.

Le livre "Cloches et carillons de Bretagne", de Gérard Loménec'h, peut documenter davantage ce sujet. Il accrédite parfaitement les souvenirs de Marie Salaün.

 

Keleier 45 - juillet 2006 

 

 
 
 

Trésors d'archives > Littéraires > Guillaume Kergourlay, ses mémoires présentés

Guillaume Kergourlay : un Elliantais et ses mémoires présentés à Ergué-Gabéric

Guillaume Kergourlay naît en 1926 à la ferme de Kernéel, où il goûte avec curiosité, au gré de la fréquentation des anciens et autres personnages étonnants de son cher Bro-Eliant, toute la richesse de la civilisation rurale et de sa culture orale.

Contrôleur de pommes de terre pendant la guerre, il milite à la Jeunesse Agricole Catholique dès 1945 et en devient même président départemental au retour du régiment. « Ce mouvement utilise beaucoup le théâtre pour brocarder les traditions sclérosantes et mettre en valeur les ferments de progrès ». (B. Rouz, Préface).Il forge sa plume dans ce théâtre de patronage. Il est bientôt tiraillé entre sa passion pour la terre, pour ceux qu’il a toujours connus et aimés et sa passion pour les planches. Il mettra quatre ans avant de se décider et de devenir « saltimbanque », autre manière d’être curieux, d’aimer les hommes, de remuer un terreau fait cette fois de choses humaines.

On retrouvera alors son nom au fronton des théâtres et des festivals : Céret, Grenoble, Beaune, Rennes. On le joue en français ou en breton au festival de Cornouaille à Quimper, à Brest, Callac, Trégunc… Son théâtre où se trouve magnifiée la société de ses racines, sans jamais sombrer dans une « mélénitude » cloisonnante, rejoint des thèmes universels : Moi Superman, 1968, dénonce la dictature des colonels grecs, La chasse présidentielle, 1974 ( censuré par Raymond Marcellin, Ministre de l’Intérieur de l’époque), s’en prend aux turpitudes de la vie politique française… 

Aujourd’hui, Guillaume Kergourlaypublie ses mémoires parce qu’il a conscience que ayant partagé jusqu’à ses vingt cinq ans l’univers des paysans de Bro-Eliant, étant écrivain, resté fidèle à une terre qu’il a apparemment quittée, il est un des seuls capables de leur rendre un vibrant hommage.

Ces Mémoires retracent la première période de sa vie, avant le départ à Paris pour se consacrer au théâtre. Elles font revivre au fil des pages les clans familiaux, les récits qu’on lui a transmis, l’opposition entre rouges et blancs, les chevaux, fierté d’Elliant, les guerres, la JAC, la destruction des talus et autres bouleversements et visages de ce monde rural et traditionnel…

Parmi les personnages qui ont marqué sa mémoire, nous croisons même p. 253 Gustave Guéguen, recteur d’Ergué-Gabéric terminant ainsi un sermon au pardon de Kerdévot en pleine deuxième guerre mondiale : « Surtout n’hésitez pas à donner, la Vierge vous en saura gré. Si quelqu’un parmi vous, par exemple ne veut pas que son voisin sache qu’il donne un billet de cent francs, qu’il le plie discrètement dedans un billet de cinq francs et personne n’en saura rien. » Guillaume Kergourlay ajoute « Je ne trouve pas que Gustave Guéguenexagère, je trouve qu’il a de l’humour ». Des mémoires écrites avec tellement de bonheur que la prose de l’auteur le chante parfois, sans s’en apercevoir, en alexandrins...

 

Keleier Arkae n°14, novembre 2001

 


Trésors d'archives > Littéraires > Le rayonnement de notre patrimoine dans de récentes publications

 

Acquisitions : le rayonnement de notre patrimoine dans de récentes publications.

Le patrimoine d’Ergué se retrouve en bonne place dans deux livres qui viennent de paraître :

Dans le Dictionnaire du Patrimoine Breton, (éd. Apogée), monumental ouvrage de 1100 pages, une notice est consacrée à Kerdévot. Fait nouveau, Erwan Le Bris du Rest, signale les vitraux contemporains de Hung Rannou : « Tradition, histoire et création se rejoignent à Kerdévot ». Une photo du retable illustre l’article.

Par neuf fois Ergué-Gabéric est cité : La peste d’Elliant p. 353 ; Flandres p. 404 ; Glazig p. 438 ; Kerdévot p. 534. Il faut noter, page 643, une superbe photo d’un mendiant à l’entrée de la chapelle de Kerdévot ; c’est un document des années 20. Quelqu’un reconnaîtrait-il ce personnage ? Evocation de l’activité papetière à Odet p.702 ; l’Orgue p. 707 ; les vitraux de Saint-Guinal p. 773 à l’article Plogonnec ; et enfin notre Saint Thélo de Kerdévot  illustre le chapitre sur les saints.

A noter un curieux oubli, notre Jean-Marie Déguignet, n’est cité nulle part. Notre paysan de neuvième classe n’a pas encore conquis droit de cité dans le dictionnaire, il est peut être encore trop vivant dans les esprits.

Dans Le Dragon en Bretagne, (éd. Keltia Graphic) Claire Arlauxnous dévoile tous les secrets de ces animaux fantastiques que l’on retrouve fréquemment dans nos édifices religieux.

L’intérêt des sablières de Saint-Guénolé n’a pas échappé à l’écrivaine, qui illustre son chapître médiéval par une reproduction de la chasse fantastique, l’un des thèmes que l’artiste anonyme du XVIIème siècle a reproduit. Très curieusement les sablières de Saint Guénolé, restaurées dans les années 70, n’ont pas de caractère religieux : c’est un bestiaire fantastique.

Claire Arlauxconsacre trois pages aux dragons du Stangala. Revenant sur l’étymologie de Griffonez, la griffonne ailée, elle évoque la légende du dragon qui terrorisait les populations alentours et que défia un jeune noble : Mahonec. A Kermahonnec dans l’ancienne paroisse de Cuzon, on peut voir encore une statue de dragon ailé (griffon) tenant dans sa gueule la tête d’un pêcheur représenté avec un filet rempli d’anguilles.

Claire Arlauxévoque aussi la variante gabéricoise de cette légende : à Ergué, c’est le Sieur Caznevet de Kerfors, qui terrassa le dragon du Stangala, qu’il fit figurer sur un rampant de la chapelle Saint-Guénolé.

 

Cliché illustrant l'ouvrage de Claire ARLAUX, cathédrale de Tréguier, stalles des ecclésiastiques.

Le dragon : protéiforme, il effraie ou se décline en motifs étonnament ornementaux.

 

Keleier 7 - novembre 2000

 


Trésors d'archives > Personnages > Hervé Riou

Hervé Riou

Par Monsieur Henri Chauveur

 

Qui est Hervé Riou ?

Hervé Riou est né environ en 1668. Il est veuf en première noce de Marie Monfort. Le mariage date du 26/01/1705 à Ergué-Gabéric. Marie est décédée le 06/01/1721 à Quillyhuec où elle habitait. Huit enfants sont nés dont Hervé, témoin à l’enterrement de son père. Hervé Riou épouse en seconde noce Josèphe Jourdren le 28/01/1723 à Ergué-Gabéric. Un enfant est né de ce mariage. Josèphe était veuve de Hervé le Breton.

Plusieurs mariages - trois - ont eu lieu à cette époque, mais la présence de Maurice le Barz comme témoin lors de l’inhumation permet de penser que les faits se sont déroulés durant les réjouissances de son mariage avec Françoise le Meur, le 26/01/1728 à Ergué-Gabéric. Il est le fils de Mathieu le Barz et de Marie Lozeach. Mathieu est qualifié de « Messire » lors des naissances de certains de ces 12 enfants à Kernaon. Maurice est né le 22/03/1699.

 

C’est en consultant les registres paroissiaux d’Ergué-Gabéric que M. Henri Chauveur, membre d’Arkae, et généalogiste aguerri a relevé ce récit d’une mort peu catholique aux yeux du recteur Jean Edy qui signe au bas de l’acte. M. Chauveur a complété sa trouvaille par des données à l’intention d’autres généalogistes d’Arkae qui auront peut-être des éléments à apporter sur les personnages ou les événements évoqués.

Le chemin de l'enfer ou le suicide du sonneur

Relevé sur le registre des BMS de 1682 à 1729 : Commune d’ERGUE-GABERIC

Ce jour, 29 janvier 1728. En vertu de la permission de monsieur le juge criminel, le procureur du Roy du présidial de Quimper dudit jour 29 janvier 1728 a été inhumé par moy soussignant, hors des lieux saints dans une fosse faite exprès et bénite conformément au rituel, vis à vis près de la croix de Kergaradec, le corps de Hervé Riouâgé d’environ 60 ans, mort au village de Kernaon, où ayant été appelé pour sonner a une noce, plusieurs des conviés qui nous ont dit que y avoit bu avec beaucoup d'excès. Il déboucha le four du village qui avoit été chauffé le jour précédent, le dit jour, le même [Hervé Riou] pour s’y mettre, d’où il fut extrait par plusieurs des conviés qui nous ont dit affirmé en présence desquels il expira peu de temps après, sans pouvoir parler ni avoir aucune connaissance. Le présent cadavre, nous avons jugé a-propos d’inhumation dans la fosse, attendu son genre de mort extraordinaire, l’abus et le mépris qu’il a fait pendant les dernières années de sa vie des principaux devoirs de la religion, quoiqu’il luy été fait dans différents temps plusieurs remontrances salutaires de la part de l’abbé de Lahaye titulaire de cette paroisse, comme le dit sieur abbé nous l’a affirmé.

Le dit enterrement en présence d’Hervé Riou fils du défunct, de Laurent le Corre, de Pierre Claude, de Maurice le Barz et autres.

signé :

Edy : Recteur d’Ergué-Gabéric

 

Keleier 23 - novembre 2002
 
 
 
 

Suite à sa découverte dans les manuscrits, du récit de la mort suspecte d’Hervé Riouau village de Kernaon, M. Chauveura poursuivi son enquête et il nous emmène dans ce numéro sur les lieux du drame.

Le lieu du drame

C'est une ferme à l'allure de manoir. Elle est dotée d'une très belle porte récupérée sur une église disparue, selon madame Cornic, la propriétaire actuelle. Elle est très délabrée et attend un amateur de vieilles pierres pour la rénover ! Elle possède à l'intérieur de beaux éléments en pierre de taille en particulier une table de pierre, à l'aspect d'un autel de chapelle, soutenue par des corbeaux de pierre et placée dans un appentis.

La maison est située sur un chemin que l'on prend à droite en allant vers Coray entre Saint-André et la route de Kerveguen. Quand on fait face au bâtiment, on remarque sur sa droite un très vieux cellier qui possède à son extrémité nord un four à pain en partie écroulé et dont l'accès se trouve à l'intérieur : est-ce le lieu du drame car un petit doute subsiste, madame Cornic nous indiquant que dans le jardin au sud de l'habitation il y avait autrefois un autre four ?

Four où le sonneur Hervé Riou se serait suicidé

 

 

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