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L'église Saint-Guinal à la fin du XVIIe

 
Différents documents, relatifs entre autres à Guy Autret de Missirien, permettent de reconstituer partiellement l’église paroissiale d’Ergué-Gabéric telle que l’on pouvait la connaître à la fin du XVIIe siècle :
 
En 1503, la tombe des seigneurs de Kerfors se trouve aussi « du cotté de l’epittre ». Il s’agit très probablement de l’enfeu (niche funéraire) qui subsiste aujourd’hui et qui porte les armoiries (cor de chasse dit greslier) des Kerfors.
En 1510, les seigneurs de Lezergué détenaient « armes et armoiries tant en ceintures, liziere (bande horizontale décorée de blasons), tombes, enfeu, avec aultres droicts et préminances. »
 
En 1634, Guy Autret fait reconnaître par les paroissiens le banc privatif des Lezerguéqui était sur leur tombe.
 
On trouve en 1652 la précision que ce « bang [se trouve] au cœur d’icelle esglise» et la tombe « au milieu du cœur de l’esglise parroissiale d’Ergué Gabellic. »
En 1638, lorsque Guy Autret achète le manoir de Kerfrez, il acquiert alors la tombe des seigneurs de Kerfrez dans l’église paroissiale, tombe qui est voisine de celle des seigneurs deCréac’h-congar, et lui échoient aussi les armoiries des seigneurs du Plessix, anciens seigneurs de Kerfrez, présentes à Saint-Guinal.
En 1647, il détient une tombe au milieu du chœur, et en plusieurs lieux apparaissent les armes de Lesergué, Kerfrez et Créac’h-congar, il a droit de bandeau funèbre (c’est-à-dire de voir à son enterrement l’église ornée de bandeaux noirs avec son blason), et lui incombent les armoiries de « Lesergué » - en fait des Coetanezre : de gueules à trois épées d’argent, garnies d’or, les pointes en bas, rangées en bande - qui figurent dans la maîtresse vitre, dans la chapelle Saint Guezennec (à gauche du chœur) et sur quatre autres vitres. La possession du manoir de Créac’hcongar lui permet de disposer d’une tombe et enfeu au haut du chœur de l’église.
 
Les deux retables datent du XVIIe siècle. Et l’orgue Dallam construit vers 1680 complète alors l’agencement connu de Saint-Guinal à l’aube du XVIIIe siècle.
 
Photo : la maîtresse-vitre, dans sa partie basse, date de 1515. François de Liziard et son épouse, qui vécurent entre 1481 et 1540, se sont faits représenter dans la vitre de la chapelle latérale sud.
Norbert Bernardkeleier arkae n°16 - janvier 2002.

 

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Trésors d'archives > Pat. religieux > La reconstruction du clocher de l'église Saint-Guinal en 1837

La reconstruction du clocher de l'église Saint-Guinal en 1837

Clocher bas

Le 2 février est à marquer d’une pierre noire dans les annales de notre patrimoine : C’est en-effet un 2 février 1701 que la foudre abattit le clocher de Kerdevot faisant deux victimes. Plus près de nous il a 170 ans un coup de vent fit tomber le clocher de l’église paroissiale St Guinal … le deux février 1836, preuves que les dérèglements climatiques ne datent pas d’aujourd’hui. Les dégâts sont considérables : la tour n’est plus qu’un tas de cailloux, les orgues sont abîmées ainsi que l’horloge, sans parler du toit. L’émotion est grande à une époque ou le clocher paroissial est l’emblème et la fierté d’une commune ou toute la population pratique la religion catholique.

 

Chasse aux subventions

Du côté officiel, les choses n’ont pas traîné. Dès le 17 mars les 9 conseillers municipaux ont devant leurs yeux le devis de l’architecte départemental Joseph Bigot. Agé de 29 ans, il signe là l’un de ses premiers devis : 7486 francs et 80 centimes, la somme est considérable.

La commune a déjà chiffré les dépenses de charrois, de fournitures et d’entretien des pierres pour 700 francs. Une souscription a été ouverte qui a permis de collecter 200 francs. La commune estime qu’elle ne pourra mettre guère plus de 300 francs. Depuis le Concordat, l’état doit rémunérer le clergé mais aussi entretenir les édifices cultuels. Le maire de l’époque René Laurent de Skividan, se tourne donc vers l’autorité compétente et «  exprime le vœu qu’il plaise à l’administration supérieure de venir au secours d’une commune qui abandonnée à ses propres ressources ne pourrait espérer voir rétablir l’église au culte de la religion pratiquée par la totalité des Habitants. »

La fabrique, c’est à dire l’association qui gère l’église paroissiale, prends le relais et écrit à l’évêque Jean-Marie Dominique De Poulpiquet de Brescanvel alors âgé de 77 ans, pour qu’il intervienne auprès du ministre des cultes, afin qu’il finance la reconstruction et demande 4000 francs. L’évêque de Quimper et du Léon fait intervenir une vieille connaissance de la noblesse bretonne, l’Archevêque de Paris Hyacinthe-Louis de Quélen, pair de France, et lui demande d’appuyer la requête. Les interventions gabéricoises ne s’arrêtent pas là : le député Augustin Le Goazre de Toulgoet, chevalier de Saint-Louis est également sollicité.

 

Adresse au Roi

Mais les résultats se font attendre. Le 4 octobre, le conseil de fabrique écrit en désespoir de cause à l’évêque : « Nous n’avons rien à attendre du gouvernement ». Ils souhaitent que le pasteur du diocèse leur cède le tiers des revenus de Kerdévot pendant quelques années, ils se promettent d’organiser une souscription pour compléter le financement. Les Gabéricois en bons bretons ne baissent pas les bras. Ils apprennent peu après Noël que le Roi Louis-Philippe vient d’échapper à un attentat à Paris. Au début de l’année 1837 le conseil de Fabrique écrit donc à Louis Philippe, en breton, une lettre touchante qui fait un parallèle étonnant entre les malheurs du roi et ceux des paroissiens d’Ergué. On l’a connaît grâce au livre Breiz-Izel ou la Vie des Bretons de l’Armorique :
Ce courrier qualifié à l’époque de chef-d’œuvre de bonhomie et de finesse par Alexandre Bouët, touche à son but, puisque la préfecture est chargé d’annoncer la bonne nouvelle au recteur d’Ergué-Gabéric :

Aotrou Roue,
Ar bloavezh 1836 a zo bet e gwirionez , leun a drubuilhoù evidomp ;
Gwall glac'haret omp bet o klevout hoc'h bet c'hwi teir gwech war bouez bezañ drouklazhet , hag an avel en deus diskaret tour iliz ar barrez d'an eil a viz c'hwevrer .
Hogen dre vadelezh Doue , deuet hoc'h a-benn d'en em dennañ diouzh an taolioù-se ha spi hon eus e teuimp a-benn , gant aluzennoù an dud vat , da renkañ hon iliz ha d'adsevel hon tour .
Ho servichourien , a-greiz-kalon hag ho keneiled gant doujañs .

Monsieur le Roi
L’année 1836 a été en vérité bien malheureuse pour nous ;
Nous avons appris avec beaucoup de tristesse qu’on a failli trois fois vous tuer , et le vent du second jour de février a abattu la tour de l’église de notre paroisse
Mais, par la grâce de Dieu, vous êtes sortis sain et sauf de tous ces dangers-là, et nous avons confiance que la charité des bonnes gens nous aidera à réparer notre église et notre tour.
Vos humbles serviteurs du fond du cœur, et vos amis avec respect.

Monsieur le préfet,

Le Roi a eu sous les yeux l'adresse en langue bretonne votée par le conseil de fabrique d'Ergué-Gabéric à l'occasion de l'attentat du 27 décembre .
Sa majesté a été touchée des bons et honorables sentiments qui s'y trouvent naïvement exprimés.
Désirant donner à cette commune un témoignage de sa bienveillance , sa majesté vient de lui destiner un secours de 300 francs pour aider aux réparations de la tour de l'église .
J'ai l'honneur de vous en donner avis , en vous priant , Monsieur , de prévenir M. le curé d'Ergué-Gabéric que cette somme va être remise à sa disposition par les soins de M. le trésorier de la couronne .
Agréez ...
    
Le secrétaire du cabinet.
Signé , Camille Vain.

Le 12 mars 1837 , le bilan du lobbying gabéricois est très loin des espérances.
L’état donne 1100 F, Le conseil général 500 francs, la Commune 300, La Fabrique 300, Le Roi, 300, et le gouvernement accepte une aide supplémentaire de 500 F.

 

Philippique
Le 14 mai 1837, le conseil municipal confie le travail au maître-maçon L’haridon, qui donc à reconstruit la tour, à l’économie. Le projet de Joseph Bigot a été sérieusement revu à la baisse et nous vaut une tour moins élancée qu’on aurait pu espérer. Amer le conseil municipal conclu : « Les habitants qui ont déjà fournis diverses sommes pour sa réparation se trouveront encore dans la nécessité de s’imposer de nouveaux sacrifices pour l’acquisition d’une horloge et de deux clochers. »

Les Orgues ne furent réparées qu ‘en 1845.

Quand à Louis-Philippe, les Gabéricois lui réservèrent un triste sort en 1848. C’est Déguignet qui nous raconte comment les enfants du Guélennec lapidèrent son effigie en plâtre que René Laurent, retiré des affaires gardait dans sa ferme de Skividan. « Nous nous étions arrêtés à regarder un grand bonhomme en plâtre posé au milieu de l’aire à battre avec une grande pipe dans la bouche. Le maire , un gros paysan qui aimait à rire assez, nous voyant là arrêtés à regarder ce bonhomme, vint demander si nous connaissions cette figure là. Non parbleu ! … il s’appelle Louis-Philippe, et était roi de France, mais il s’est sauvé comme un bramer coz . Les Parisiens voulaient bien le tuer, mais ils n’ont pas pu. Eh bien, mes enfants, dit-il, voyons si vous serez plus forts que les parisiens, vous allez ramasser des cailloux et vous allez tirer dessus, et le premier qui lui cassera sa pipe aura un sou. » On peut penser comme les cailloux pleuvèrent [sic] dru sur le pauvre bonhomme Philippe, non seulement sa pipe, mais sa tête, et tout le reste de son corps furent brisés en moins de cinq minutes, pendant que le maire se tenait les côtes de rire. Voilà comment on arrange les hommes qui tombent, les rois comme les autres. Le maire était cependant un fervent philippiste, puisque ce fut lui-même qui fit fabriquer cette statue pour orner son bureau, et puis, il fut le premier peut-être, à la mettre dehors, et à la faire mutiler, de tous les maires de France. »
 René Laurent s’était peut être vengé ainsi du peu d’intérêt que l’État montra à ses projets. C’est lui qui en 1840 laissa voter le projet pharaonique de déplacement du bourg à Penn-Carn Lestonan, c’est lui qui également fit voter une résolution pour déplacer la chapelle de Saint-André près de la route de Coray. Deux projets bloqués par le préfet. La prochaine mise en en lumière du clocher paroissial devrait lui donner un peu de baume au cœur c’est le seul chantier d’envergure qu’il a mené à bien.

Bernez Rouz - (Bulletin municipal d'Ergué-Gabéric. septembre 2007).

 

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Trésors d'archives > Pat. religieux > Notes sur les chapelles par Anatole Le Braz

Notes sur les chapelles par Anatole Le Braz

Anatole Le Braz

En 1886 Anatole Le Braz est nommé professeur de lettres au lycée de Quimper. Dès son arrivée, François-Marie Luzel alors archiviste départemental et conservateur du musée archéologique de la ville, l’associe à ses travaux. Anatole Le Braz effectue bientôt ses premières collectes de contes, légendes et traditions. Il se voit confier trois missions officielles par le ministère de l’Instruction Publique, notamment afin de recueillir les traditions populaires sur les vieux saints bretons et leurs oratoires puis sur ce qu’il reste de la tradition des mystères bretons. Dans ce cadre, de 1892 à 1898 environ, il parcourt la Basse Bretagne et se sert de petits carnets sur lesquels il consigne ses observations ainsi que sa rencontre et quelques-uns de ses échanges avec Déguignet. Voici rassemblés des extraits des carnets d’Anatole Le Braz dans lesquels il est question d’Ergué-Gabéric. Ils nous donnent ainsi des aperçus de notre patrimoine dans les années 1890 et nous font part d’éléments et de traditions aujourd’hui oubliés.

 

Fontaine Saint-Guénaël à Kerrouz

« fontaine de Saint-Guénaël près du Stangala au village de Kerrouz où l’on trempait les enfants pour les guérir de certaines maladies. Guénaël patron d’Ergué-Gabéric ». (carnet E 76)

Saint-Guénolé

« Saint-Guénolé : pardon 3ème dimanche de juillet. La chapelle sur une hauteur dans un bois de hêtres ». (carnet E 40)

Photo : Extrait des carnets d'Anatole Le Bras concernant la statuaire de St Guénolé.

« À Ergué-Gabéric, auprès de Saint-Guennolé, il y a une fondrière (eun toul-lap) qu’on appelle poull ar c’héméner. C'est là, disait-on, qu'on trouvait tous les enfants qui naissaient dans les fermes des environs.
Le quéméner qui a donné son nom à ce poull était un tailleur extraordinaire : il allait toujours seul, ne voulait pas d'apprenti. Pour revenir chez lui le soir, il passait toujours par ce poull. Il y avait de l'eau là, dans l'hiver, jusqu'à la ceinture. Chaque fois qu'il arrivait près de ce poull noir, il criait :
- Harz ar Bleiz ! Venez à mon secours, car le loup me dévore.
Il y avait réellement des loups en ce pays, dans ce temps-là. Les gens accouraient pour lui porter aide. Lui alors se moquait d'eux :
- Vous auriez mieux fait de rester au lit.
Mais à la fin, à force de se moquer des paysans, ceux-ci n'allaient plus. Or, un soir, il fut dévoré. On ne trouva que sa tête. Cette tête est encore là sous une grosse pierre debout, un menhir où est sculptée une croix. Cette pierre est toujours là ».
« À Saint-Guennolé, il y a un saint Isidore au-dessus du portail d'entrée, avec une faucille à la main. »

Sainte Apolline

« Il y a en Ergué, sur la route de Kerdévot, auprès de Lezergué, une fontaine de sainte Apolline (santez Apollina).
C'est la patronne des dents : elle est représentée à Saint-Guennolé avec une tenaille à la main, et une dent entre les pinces de la tenaille. On allait à la fontaine jeter des croix de bois, pour le mal de dents. Peut-être la statue de sainte Apolline est-elle maintenant au bourg d'Ergué ». (carnet ED 40 253-258, propos inédits de J.-M. Déguignet recueillis par Anatole Le Braz )

Saint-André

« II y a encore en Ergué-Gabéric la chapelle de Saint-André qu'on a reconstruite il y a une quinzaine d'années.
« Le dimanche des Rameaux, les paysans cornouaillais ont l'habitude de planter un rameau de laurier bénit dans leurs champs ». (id.

Kerdévot

« 29 juin 1899 venu ce soir à Kerdévot. Remarqué l’hermine ailée qui est sculptée au fronton de la Tour. Le calvaire a quatre niches de face et deux sur chaque bout. Toutes vides. On entend du dehors le bruit sourd du balancier qui fend lourdement son heure. Édouard remarque avec raison que quelqu’un qui entendrait cela de nuit - un Breton - serait singulièrement effrayé. Sur la route un peu avant d’arriver à la chapelle et sur la gauche, une maisonnette d’où sortait un bruit de métier de tisserand et un chant de navette. Il y aurait quelque chose à écrire sur un tisserand de Notre-Dame. La chapelle de Kerdévot est une belle chose mais ce qui est encore plus beau c’est le cadre, l’immense chênaie plusieurs fois séculaire qui lui sert de parvis et tout alentour un foisonnement de verdure intense avec entre les grandes frondaisons de jolies éclaircies de soleil sur des prairies, sur des froments, sur des vergers où les fruits se nouent ».
Et plus loin dans le même passage : « Le chêne est à lui seul un monument avec de grandes plaies, de vraies grottes dans son écorce et les bossellements de ses racines qui forment des sièges naturels ». (carnet EG 86)
« Le clocher est d’une sveltesse extraordinaire et pointe très haut au dessus des arbres. On le voit de la montée de tout à l’heure aigü et clair au-dessus des grandes verdures de la vallée boisée où est située la chapelle à mi-versant. Deux fermes sont de part et d’autre : l’une un ancien manoir avec un très grand porche, l’autre masquée derrière un rideau de pins ». (carnet ED 42).

Lezergué

"Vu au château de Lezergué (9 septembre 1893) sur une armoire datant de 1822 dans la cuisine une représentation de saint Edern mitre en tête sur un cerf à corps de cheval très fringant avec énormes bois sinueux, la crosse dans une main. Les gens de la maison savent du reste que c’est saint Edern ». (carnet ED 42)

 

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Trésors d'archives > Politique > Pour une signalisation bilingue

Pour une signalisation bilingue

 
Comme beaucoup de communes, Ergué-Gabéric s’apprête à appliquer les principes du bilinguisme sur les panneaux de signalisation. Une première réunion avec un élu de Pluguffan a permis de s’informer sur la manière de procéder. Une commission a été mise en place comprenant des membres d’Arkae et de Brezhonegerien Leston’ pour faire un état des lieux et faire des propositions pour une politique rationnelle et progressive de mise en place d’une signalisation bilingue.
 
Photo : ces noms anciens porteurs d'histoire et d'identité nous viennent du Moyen-âge.
 
La dénomination publique des noms a un intérêt patrimonial capital. Ce sont ces noms anciens qui sont aujourd’hui porteurs d’histoire et les noms que nous mettons aujourd’hui à nos rues seront aussi les témoignages de notre époque : il faut donc les choisir avec soin, car c’est notre image que nous transmettons. Dans ce contexte, le bilinguisme a toute sa pertinence. Certes le nombre de bretonnants de naissance continue à décroître, mais, d’un autre côté, jamais l’attachement à notre langue ancestrale n’a été aussi fort, et, à l’image de la filière bilingue créée à Lestonan, le breton est langue d’avenir pour affirmer notre identité dans un monde qui perd peu à peu ses repères.
 
La situation linguistique des prochaines années semble se dessiner avec plus de netteté : la totalité de la population parlera le français, et ce sera la langue commune de notre société. A côté de cela une minorité non négligeable continuera à cultiver ses racines en utilisant le breton. L’objectif fixé par le Conseil Régional est de dix pour cent de la population. Enfin l’usage de l’anglais  ne fera que s’accentuer à l’heure de la mondialisation. Ergué accueille déjà plusieurs familles anglophones, ou mixtes, et la pratique du multilinguisme ne fera que s’accentuer.
 
Cette étude comprend trois volets :
  1. Les noms de lieux déjà existants.
  2. Les noms de rues déjà existants et à créer.
  3. Les dénominations à créer : signalisation routière et celle des bâtiments publics.
 
Les principes qui nous guident dans cette étude sur le bilinguisme sont simples :
  1. Respecter le legs de nos ancêtres en gardant les noms bretons qu’ils ont forgés depuis 1500 ans.
  2. Utiliser les formes bilingues quand il le faut.
  3. Donner la possibilité aux nouveaux apprenants de trouver dans la signalisation publique la marque forte de notre identité.
 
Une grande anarchie règne dans la toponymie d'Ergué-Gabéric à cause de la superposition de graphies anciennes ou fautives.
 
Les cadastres se contredisent, les cartes colportent des graphies parfois fantaisistes, le francisation se fait bizarrement : 
 
 
Breton du moyen âge :panneaux lieux-dits
  • Ty : aujourd’hui on écrit ti.
  • Parc : aujourd’hui on écrit Park.
  • Creac’h : aujourd’hui Krec’h.
Graphie du cadastre de 1836 : 
  • Croas ar gac : aujourd’hui on écrit Kroaz ar Gag.
Des noms ont été traduits en français : 
  • Ar sal C’hlas  devenu Salverte puis Salleverte.
  • Ar groaz ru devenu La croix rouge.
  • Meilh Jet devenu Moulin du Jet.
Certains noms ont subi une francisation orthographique :
  • Lenn hesk est devenu lenhesq.
  • Kersaoz est devenu Kersaux.
  • Kerfor est devenu Kerfort.
 
Certains noms ont été altérés par l’anglais :
  • Trolann devenu Troland ( il n’y a aucune raison de mettre un d comme dans l' anglais Land qui signifie « terre »).
  • Parc ar land : on devrait écrire Park al Lann (du breton Lann : ajonc).

D’autres sont écrits dans une orthographe qui n’a aucun fondement :

  • Kerhô : il n’y a aucune raison de mettre un accent circonflexe.

D’autres ont subi une bretonnisation mal aboutie :

  • Gars Haleg, Gars Halec, Garsalec : aujourd’hui on écrit en breton Garzhaleg, qui signifie Haie de Saules.
  • Hent ar troland vian : on devrait écrire Hent Trolann Vihan.
 
Les noms de rue les plus récents sont en français pour la plupart, mais on trouve beaucoup d’exemples mixtes français-breton : 
  • Allée Izella : on devrait écrire Ale Izelañ.
  • Avenue Per Jakez Helias : le vrai nom d’état civil est Pierre-Jakez Hélias ; si on le met en breton : Per-Jakez Helias, ne devrait-on pas mettre la pancarte en bilingue : Bali Per-Jakez Helias et Avenue Pierre-Jakez Hélias.
  • Angéla Duval : ou bien on met Anjela Duval qui est son nom de plume en breton ou Angèle Duval qui est son nom d’état civil     …/...
 
La totalité de la population d’Ergué parle le français. Un bon pourcentage connaît et pratique le breton. Le breton petit à petit acquiert une reconnaissance par les institutions. Il s’agit d’en tenir compte. De plus l’internationalisation des échanges implique qu’on fasse simple mais aussi enraciné. Il faut :
  • Tenir compte du patrimoine. Le nom c’est un patrimoine qu’on transmet. Avant toute dénomination il faut vérifier qu’un nom original ne disparaisse pas de la mémoire collective.
  • Eviter la banlieuisation d’Ergué. Evitons les noms qu’on trouve dans les pourtours de grandes villes où il faut baptiser à la va-vite des quartiers entiers de noms de fleurs, d’arbres, d’écrivains de peintres qui n’ont rien à voir avec la réalité locale.
  • Mettre en valeur nos hommes illustres.  Il est anormal de n’avoir pas à Ergué des rues Yves Cabellic, Guy Autret, Mgr de la Marche,
 

 

Quelques exemples :

 
Cleuyou(1834). Ce lieu-dit est prononcé localement /kleuyou/. L’éthymologie est claire : il s’agit du mot Kleuziou, Talus (le /Z/ entre deux voyelles ne se prononce pas en Cornouaille). Nous préconisons donc l’écriture Kleuyou.
 
Griffonès : Les formes anciennes sont : Griffonez (1426), Griffones (1475), Griffonnes (1536), Grifones (1680). Le problème à résoudre est d’écrire avec un ou deux /F/, un ou deux /N/ et d’écrire avec un /S/ ou un /Z/ à la fin du mot. Le mot vient de Grifon, animal fantastique du moyen âge, sans doute le célèbre dragon de la légende du Stangala. L’éthymologie, la prononciation et l’écriture du breton moderne convergent pour une écriture stabilisée : Grifonez.
 
Lestonan : Les formes anciennes sont Lesdonan (1540), Lestonnan (1540), Lesthonan (1678), Lestonnant (1678), Lestonan (1685). L’éthymologie du nom est donnée par la plus ancienne forme du nom Lez –Donan, qui peut se traduire par la cour (Lez) d’un petit noble rural dénommé Donan. Mais la prononciation de Lez renforce le D en T, et l’accent tonique très fort sur l’avant dernière syllabe sur le /To/ de Tonan renforce le Z en S. Celle ci d’ailleurs accentue tellement l’avant dernière syllabe que la dernière ne s’entend plus. On dit /Leston’/, comme on dit chez nous /bar/ au lieu de bara. C’est la conséquence de notre accentuation.

On peut donc garder la graphie actuelle Lestonan qui sans dénaturer l’origine du mot, tient compte de la prononciation locale.
Bernez Rouz
 
 
 
 

Trésors d'archives > Pat. rural > Construire au bourg d'Ergué en 1722

Construire au bourg d'Ergué en 1722

 
Construire au bourg 1722 Dessin réalisé par Albert TanguyVoici un document rare qui a été confié à notre centre de documentation.
C'est la facture pour la construction d'une maison au bourg d'Ergué-Gabéric en 1722.
Le propriétaire en était François Le Poupon, né vers 1668 et marié à Marie Nedelec en 1710.
Il mourut peu après la construction de la maison neuve en 1728 à l'âge de 60 ans.

L'orthographe non fixée à l'époque a été mise volontairement en français contemporain.
 
Mémoire pour François Le Poupon des frais et dépenses qu’il a eut à bâtir une maison au bourg d’Ergué-Gabéric, l’année mille sept cent vingt et deux.
 
Et en premier
  • Donné à Monsieur de Penenrun pour un courtil1 et l’emplacement de la maison et les frais et {illisible} du contrat : soixante neuf livres2.
  • Pour faire un fossé neuf et séparer les autres autour du dit courtil, donné à Yves Le Meur : vingt et un livres.
  • Pour les pierres et les livrer de la perrière3, il me coûte : vingt livres.
  • Pour tirer les attraits4 de la maison : dix livres deux sols et six deniers.
  • Pour faire charroyer les pierres : trente six livres.
  • Pour six semaines de temps que Le Poupon a été employé à travailler autour de la dite maison, servir les maçons, chercher des charrettes et autre travail : dix livres, six sept sols et six deniers.
  • Et pour sa dépense, pareille somme de : dix livres, dix sept sols et six deniers. 
  • Pour le maçonnage de la maison donné en argent aux maçons : soixante livres.
  • Donné aux darbareurs5 en argent, seize livres dix sols.
  • Pour la nourriture des maçons et darbareurs et autres : soixante livres.
  • Pour le temps de la femme du dit Poupon et pour le payement d’autres personnes qu’il lui a fallu prévoir en sa place : six livres.
  • Pour trois poutres et le grand boisage donné à Jean Le Camme, quarante et deux livres.
  • Pour les lattes et chevrons : quinze livres.
  • De plus donné aux darbareurs pour finir la maison entre argent et nourriture : trois livres dix sols.
  • De plus pour tirer et tailler des pierres pour faire les côtés du pignon du couchant de la dite maison donné aux maçons : deux livres.
  • La paille pour couvrir la dite maison, compté : 14 livres.
  • Pour la façon de la couverture : trois livres.
  • Pour un mois de temps que le dit Poupon a été employer à boiser la dite maison et faire la porte et les fenêtres : douze livres.
  • Le bois pour faire la porte et les fenêtres : trois livres dix sols.
  • Pour la façon du présent : trois livres
  • Le présent mémoire se monte à la somme de quatre cents vingt quatre livres, sept sols et six deniers.
 
On a ici probablement la construction d’un penn-ti : une seule porte, trois poutres, toit en paille.
Le temps global passé à la construction est de six semaines, il s’agit donc d’une construction simple et à moindre coût puisque le propriétaire et sa femme travaillent sur le chantier.
 

1.  Courtil : en breton liorzh, petite parcelle de terre
2. La livre valait 0,31 gramme d’or pur, dans une livre il y avait 20 sols et dans un sol 12 deniers.
3. Perrière : carrière de pierres en breton mengleuz
4. Attraits : confusion probable avec trait, tirer les traits de la maison, faire le plan.
5. Darbareur : apprenti maçon, maneuvre chargé de faire le mortier. En breton darbarer.